Dominique de Villepin, une certaine idée de la France et de lui-même

L'ancien Premier ministre et ancien ministre des Affaires étrangères, longtemps rival acharné du président Nicolas Sarkozy au sein de la droite, a annoncé dimanche qu'il avait "décidé d'être candidat à l'élection présidentielle de 2012" en France.

Flamboyant pour ses admirateurs, grandiloquent pour ses détracteurs, Dominique de Villepin revendique volontiers de voir la politique en grand, quand il n'affiche pas son mépris pour le reste du personnel politique, essentiellement composé, selon lui, de courtisans.

Et pourtant, c'est en homme de l'ombre que ce diplomate né à Rabat, au Maroc, a débuté en politique. Il est issu de la même promotion de l'ENA que François Hollande ou Ségolène Royal, la fameuse promotion Voltaire en 1980. Avant l'élection présidentielle de 1995, il est l'un des rares à croire en Jacques Chirac alors que c'est Edouard Balladur qui plane dans les sondages. A l'issue de la campagne victorieuse de son mentor, il est nommé secrétaire général de l'Elysée, toujours dans l'ombre de Jacques Chirac qui l'apprécie beaucoup et dit de lui qu'il est « à la fois un poète et un très bon capitaine d'escadron de commando ».

Poète, Dominique de Villepin l'est au sens propre puisqu'il a publié des recueils. Capitaine d'escadron de commando, il l'est aussi selon ceux qui à l'époque le décrivent en animateur d'un « cabinet noir » contre les adversaires du président de la République, autrement dit les Balladuriens. C'est de cette époque de déchirements à droite que date le début de sa rivalité avec Nicolas Sarkozy. Ce sont les mêmes qui rappellent son rôle dans la dissolution de 1997, dont il était un chaud partisan et qui allait amener Lionel Jospin à Matignon.

Un héros de bande dessinée

C'est à l'issue de cette période qu'il va entrer en pleine lumière. En 2002, après la réélection de Jacques Chirac face à Jean-Marie Le Pen, il entre au gouvernement comme ministre des Affaires étrangères de Jean-Pierre Raffarin. C'est à ce titre qu'il va connaître son plus haut fait de gloire. Le 14 février 2003, il prononce devant le Conseil de sécurité de l'ONU un discours contre la guerre en Irak voulue par les Américains. Fait rare dans cette enceinte, il est très applaudi.

C'est de ce Dominique de Villepin chef de la diplomatie française qu'est plus que largement et tout à fait ouvertement inspiré le personnage principal de la bande dessinée Quai d'Orsay qui va connaître un grand succès et dont le deuxième tome sort précisément au moment de sa déclaration de candidature.

En 2004, il est nommé au ministère de l'Intérieur où il remplace un certain Nicolas Sarkozy, nommé à l'Economie. Fin mai 2005, à la suite du non au referendum sur le traité constitutionnel européen, Dominique de Villepin est nommé Premier ministre par Jacques Chirac. Sa rivalité avec Nicolas Sarkozy devient alors une véritable duel. Plusieurs épisodes seront l'occasion de croiser le fer, comme les émeutes urbaines de l'automne 2005, durant lesquelles en décrétant l'état d'urgence, il va s'imposer face à son ministre de l'Intérieur très décrié dans les banlieues. A ce moment, il est vu comme un présidentiable au moins aussi crédible que Nicolas Sarkozy, qui a pris la présidence de l'UMP.

Clearstream, duel à mort

C'est en voulant pousser son avantage que Dominique de Villepin va trébucher. Pour lutter contre le chômage des jeunes, il lance le contrat première embauche, qui va provoquer grèves et manifestations chez les étudiants. Malgré les conseils de ses amis, il s'entête, et finalement, en avril 2006, il est contraint d'abandonner le CPE. Un mois plus tard, il est mis en cause dans l'affaire Clearstream, accusé de falsification de listings de cette société luxembourgeoise pour compromettre Nicolas Sarkozy, qui se constituera partie civile.

Ce duel à mort va marquer la fin de la présidence Chirac alors que la candidature de Nicolas Sarkozy s'impose, Dominique de Villepin doit s'incliner. Après l'élection de son rival, il est mis en examen dans l'affaire Clearstream qui lui vaudra deux procès durant lesquels il dénoncera l'acharnement de Nicolas Sarkozy. Relaxé en appel après avoir perdu la plupart de ses soutiens qui ont rallié le camp Sarkozy, Dominique de Villepin est considéré comme un homme seul. République solidaire, le mouvement politique qu'il a créé, est surnommé « République solitaire » dans l'entourage du chef de l'Etat. C'est donc armé de son seul orgueil, et dans la droite ligne d'un héritage gaulliste revendiqué, que Dominique de Villepin se lance dans la course présidentielle.

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