Avec notre correspondante à Istanbul, Anne Andlauer
Pendant des années, Ankara a réclamé de l’Union européenne qu’elle accélère le versement des six milliards d’euros promis dans l’accord migratoire de mars 2016, qu’elle débloque des fonds supplémentaires et qu’elle les verse directement dans les comptes de l’État turc, non pas sur la base de projets à des institutions et des ONG internationales. Tout cela pour aider la Turquie à accueillir plus de 3,7 millions de Syriens. Tout cela en menaçant régulièrement « d’ouvrir les frontières ».
Depuis le 28 février, la frontière gréco-turque est ouverte – du côté turc seulement – et, officiellement, Ankara ne veut pas d’argent. En début de semaine, le président Recep Tayyip Erdogan a même affirmé avoir rejeté une aide européenne d’un milliard d’euros pour l’accueil des migrants.
Depuis 2016, les priorités ont changé. La Turquie ne veut plus d’aide pour accueillir les Syriens, mais pour les renvoyer chez eux et en empêcher d’autres d’arriver sur son sol. L’offensive du régime et de son allié russe dans la province d’Idleb, qui a déjà poussé près d’un million de civils vers la frontière turque, a été un point de rupture.
La Turquie, qui a jusqu’ici échoué à convaincre la Russie de faire cesser cette offensive, fait pression sur l’Europe pour qu’elle l’appuie dans son projet de « zone de sécurité » à la frontière turco-syrienne.