Italie: Giuseppe Conte désigné chef du gouvernement

Le président italien, Sergio Mattarella, a chargé ce mercredi Giuseppe Conte, un juriste proposé par les antisystème et l'extrême droite, de former le prochain gouvernement. « Le président de la République, Sergio Mattarella, a reçu cet après-midi le professeur Giuseppe Conte, auquel il a donné le mandat pour former le gouvernement », a déclaré à la presse le secrétaire général de la présidence, Ugo Zampetti.

Le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) et la Ligue (extrême droite), qui disposent d'une courte majorité au Parlement et ont élaboré un programme commun résolument anti-austérité et sécuritaire, avaient proposé le nom de Giuseppe Conte dès lundi soir. Mais le président a temporisé presque 48 heures, peu convaincu de l'autorité de Guiseppe Conte, un discret professeur de droit de 53 ans sans expérience politique, face aux poids lourds de la Ligue et du M5S qui devraient devenir ses ministres.

C'est à lui qu'il revient désormais de mettre la dernière main à la composition de son gouvernement, qui fait depuis des jours l'objet d'âpres négociations entre le M5S et la Ligue. Cette liste devra ensuite recevoir l'aval de Sergio Mattarella, puis le gouvernement ira prêter serment avant de se présenter devant la Chambre des députés et le Sénat pour obtenir leur confiance.

Selon les médias italiens, Matteo Salvini, patron de la Ligue, devrait devenir ministre de l'Intérieur tandis que Luigi Di Maio, chef de file du M5S, hériterait d'un grand ministère du Développement économique.

Tourner le dos à l'austérité

Le nom qui pose le plus de problèmes est celui que la Ligue veut imposer pour le portefeuille de l'Economie : Paolo Savona, un ancien ministre (1993-1994) de 81 ans considérant l'euro comme une « cage allemande » pour l'Italie.

Garant du respect des traités internationaux, Sergio Mattarella, élu par un Parlement à majorité de centre gauche, tient à s'assurer que l'Italie respectera ses engagements européens. Le programme commun négocié par le M5S et la Ligue tourne en effet résolument le dos à l'austérité et promet de combler les déficits avec une politique de croissance. Il prévoit des baisses drastiques d'impôts, l'instauration d'un revenu de citoyenneté ou encore l'abaissement de l'âge de la retraite dans le deuxième pays le plus vieux du monde.

De quoi inquiéter à Bruxelles, où le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, a appelé mercredi l'Italie à apporter « une réponse crédible » sur sa dette publique, la deuxième plus élevée de la zone euro après la Grèce. De quoi aussi rendre les marchés financiers nerveux: mercredi, la Bourse de Milan a perdu mercredi 1,31% tandis que le spread - l'écart très regardé en Italie entre les taux d'emprunt italien et allemand à dix ans - a clôturé à 191 points (+60 en huit jours).


Si la candidature de Giuseppe Conte, juriste de 54 ans, a été acceptée par le président Sergio Mattarella, c'est pour le pays une nomination dans la douleur. L'Italie se retrouve avec un exécutif antisystème qui ne lève pas de nombreux doutes.

Avec notre correspondant à Rome, Eric Sénanque

C'est un accouchement dans la douleur que l'Italie a vécu mercredi soir. Pendant plus d'une heure trente, la porte du bureau de Sergio Mattarella est restée close et à laisser pu imaginer la gravité de la situation d'un pays qui a attendu des semaines un capitaine à sa tête.

Depuis le début de la semaine, le président italien ne cessait de temporiser, demandant des garanties pour l'avenir de son pays, car le candidat proposé par Matteo Salvini et Luigi Di Maio sortait de l'inconnu. Dans sa première allocution, Giuseppe Conte a tenu à marquer sa différence avec l'équipe sortante, balayée lors des législatives du mois de mars : « Ce qui s'apprête à naître va être le gouvernement du changement. Mon intention est de donner vie à un gouvernement venant des citoyens, qui protège leurs intérêts, je me propose d'être l'avocat et le défenseur du peuple italien. »

Si Conte a aussi assuré vouloir confirmer la place de l'Italie en Europe et dans le monde, son discours était à l'image de ses deux mentors que sont Matteo Salvini et Luigi Di Maio, qui souhaitent renégocier les traités européens. Les patrons de la Ligue et du Mouvement 5 étoiles vont désormais soumettre leurs noms pour les ministres qui rentreront au gouvernement. Ce sont eux qui restent maîtres du jeu politique italien.

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