Avec notre correspondante à Istanbul, Anne Andlauer
Coup de bluff ou menace sérieuse ? Les chars turcs déployés depuis le 18 septembre en face du Kurdistan d’Irak vont-ils traverser la frontière, et précipiter la Turquie dans une nouvelle aventure militaire ?
Si rien ne l’indique pour l’instant, les dirigeants à Ankara suggèrent très lourdement qu’une telle option n’est pas exclue.
« Elle est sur la table », a même dit cette semaine le président Recep Tayyip Erdoğan, prévenant que son pays pourrait « arriver une nuit sans prévenir » chez son voisin kurde irakien.
Vers une intervention ?
Ünal Çeviköz, ancien ambassadeur de Turquie en Irak entre 2004 et 2006), ne croit pas à une incursion armée. Ankara aurait bien du mal, selon lui, à en justifier la légitimité et la légalité au regard du droit international.
« Le référendum sur l’indépendance ne signifie pas qu’un Kurdistan indépendant va forcément voir le jour », rappelle-t-il.
« Pour qu’Ankara commence à envisager sérieusement une intervention militaire, estime Ünal Çeviköz, il faudrait a minima un changement du statu quo en Irak : l’éclatement du pays et la proclamation d’un Etat kurde indépendant. »
Stratégie de la tension
« Et même dans un tel scénario, conclut le diplomate, l’option militaire devrait être considérée avec la plus extrême prudence. Pour l’heure, je pense donc qu’il s’agit simplement d’une démonstration de force. »
Quelles que soient ses intentions, la Turquie entretient cette stratégie de la tension. Le Parlement a prolongé le 23 septembre dernier une motion autorisant l’envoi de soldats en Irak, un mois avant la date prévue.
Et le gouvernement vient d’annoncer une hausse des taxes visant à renforcer son budget militaire de plus de 2 milliards de dollars.