[Reportage] Référendum en Turquie: le camp du «oui» monopolise la campagne

A trois jours du référendum présidentiel en Turquie, le parti de Recep Tayyip Erdogan continue de monopoliser la campagne tandis que ses détracteurs dénoncent une dérive autoritaire.

Une chanson à la gloire de Recep Tayyip Erdogan et partout des portraits de lui avec un slogan : « Evet », « oui » en turc. « Oui » au référendum renforçant les pouvoirs du président. Les partisans du chef de l’Etat distribuent des tracts dans la rue. « Depuis 40 ans, la Turquie connaît le terrorisme. Des groupes nous attaquent. Avec la nouvelle Constitution, le président va pouvoir agir plus efficacement contre le terrorisme. Avant, avec les gouvernements de coalition, ce n'était pas efficace », juge Muzaffer Sert, élu municipal à Istanbul, au micro de notre envoyée spéciale à Istanbul, Murielle Paradon.

Cet hyper président qui pourrait naître du référendum dimanche 16 avril assurerait plus de stabilité à la Turquie, affirment ses soutiens. Pour Kenan Kandaz, agent immobilier à Istanbul, c’est un rôle sur mesure pour le charismatique Erdogan. « J'aime les qualités de leader de Erdogan. Le peuple le suit. Lors de la dernière tentative de coup d'Etat, le peuple est descendu dans la rue. Ça montre la force d'Erdogan », estime-t-il.

Les partisans du « non » sous pression

L'opposition, elle, dénonce la dérive autoritaire du président turc. Mais elle est muselée et a bien du mal à faire campagne pour le « non ». C'est le cas dans la ville de Van, dans le sud-est de la Turquie à majorité kurde, où s'est rendu notre correspondant Alexandre Billette. Rue de la Culture, les militants du « non » ont installé un kiosque géré par le HDP, le parti de la gauche pro-kurde.

Le maire HDP de la ville est en prison pour ses liens supposés avec le PKK, mais le parti dirige malgré tout la campagne du « non », en dépit des difficultés. « Tu fais un meeting et autour du rassemblement, ils installent des clôtures de 2 mètres de hauteur, une vingtaine, une trentaine de caméras de surveillance nous filment, un drone nous survole. Et après ils disent : "c'est un meeting libre hein, tu peux y participer" », dénonce Yakup Ata, le chef du parti pour la région.

Dans les rues, les stands sont parfois fermés par les policiers. « Les policiers viennent et nous disent de ne pas crier. Parce que vous dites la vérité, ils vous mettent la pression ! Si vous criez, ils vous mettent en garde à vue, tenez, ils ont encore contrôlé notre identité là, il y a deux minutes, s'emporte Bayram. Si on disait quelque chose de mal, ils auraient le droit de le faire. Mais tout ce qu'on dit, c'est "non au régime d'un seul homme" ».

Le « non » devrait très largement l'emporter dimanche dans cette ville à majorité kurde où le HDP avait obtenu plus de 65 % des voix lors du dernier scrutin.

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