Les perturbateurs endocriniens, tels le bisphenol A, les parabens ou les phtalates sont des substances chimiques qui interfèrent avec le système hormonal, le perturbent. Les experts estiment qu’ils peuvent avoir un impact sur la santé. Cancers du sein, de l’ovaire, des testicules, puberté précoce, infertilité, troubles neuro-comportementaux (troubles de l’attention, hyperactivité), diabète ou encore obésité. Autant de maladies, ou d’anomalies, en pleine expansion et en lien avec le système hormonal, favorisées par les perturbateurs endocriniens.
Il est vrai que ces substances sont partout ou presque : dans les objets les plus banals du quotidien, par exemple certains rouges à lèvres, lingettes pour bébés, dentifrices, shampooings, où ces substances peuvent être utilisées comme conservateurs ; dans des jouets, des matières plastiques, des peintures, dans l’alimentation aussi, via notamment les résidus de pesticides.
Danger même en infime quantité
Même présents en infime quantité, les perturbateurs endocriniens peuvent être dangereux. Ils défient une loi communément admise en toxicologie : « c’est la dose qui fait le poison ». A très faibles doses, certaines de ces substances ont un effet délétère.
S’ajoute à cela ce qu’on appelle l’effet cocktail, c’est-à-dire le fait d’être exposé à plusieurs molécules nocives ; les conséquences s’en trouvent amplifiées. Beaucoup d’industriels continuent pourtant d’invoquer la dose, et se défendent en disant qu’ils respectent les seuils réglementaires.
Ainsi, les perturbateurs endocriniens sont des substances chimiques très particulières. Afin de pouvoir les interdire ou les réguler, il faut d’abord les identifier et les classer, bref en donner une définition. A l’échelle de l’Europe, c’est la Commission européenne qui en a la charge.
Les lobbys industriels font pression
Cette définition, attendue depuis trois ans, est source de tensions. Dans la bataille, il y a d’un côté les lobbys industriels, qui rechignent à chercher ou élaborer des substances alternatives, synonymes de coût, et de l’autre, les associations et un nombre grandissant d’experts.
En décembre 2016, la Commission souhaitait soumettre la définition suivante au vote des Etats: « un perturbateur endocrinien est une substance qui a des effets indésirables sur la santé humaine, qui agit sur le système hormonal et dont le lien entre les deux est prouvé ».
Prouver, c’est là que le bât blesse. Le niveau de preuves exigé a été jugé irréaliste par des associations. Il faut dire que dans ce domaine prouver un lien de cause à effet est très compliqué. On arrive au mieux à un faisceau de fortes présomptions. Ce projet de définition a été retoqué par certains Etats membres, dont la Suède et la France, car pas assez protecteur de la santé humaine et de l’environnement.
La France rejette la nouvelle classification
La Commission a donc dû plancher à nouveau sur le sujet, et a livré une nouvelle classification, examinée le 28 février 2017, qui a été rejetée également, du fait notamment de la France, de la Suède, du Danemark, et de l’Espagne. Pour l’ONG Générations futures, cette version comportait des améliorations, mais demandait « toujours un niveau de preuves trop élevé » et prévoyait « des dérogations inacceptables ».
Les scientifiques, tout comme la France, militaient pour une classification des perturbateurs endocriniens similaire à celle des substances cancérigènes, c’est-à-dire avec 3 catégories : avérés, présumés, et suspectés.
Pour la Commission européenne, c’est en tout cas un retour à la case départ. Reste qu’aujourd’hui le sujet des perturbateurs endocriniens n’est plus cantonné à la sphère des scientifiques et des associations. Une véritable prise de conscience a lieu. Signe des temps, certains candidats à la présidentielle française, Benoît Hamon en tête, se sont emparés du sujet.