La perpétuité a été requise contre Asli Erdogan, alors que les autres inculpés risquent entre sept et quinze ans de prison, dans ce procès qui a commencé ce jeudi 29 décembre matin au tribunal de Caglayan, en présence de nombreuses personnes appartenant au comité de soutien d’Asli Erdogan.
Le correspondant de RFI à Istanbul, Alexandre Billette, évoque une situation confuse au tribunal, car il ne reste plus que deux accusés dont Asli Erdogan. Cinq de ses co-inculpés ont en effet quitté le pays avant le procès, et seront donc jugés par contumace. Et ce jeudi matin, deux autres accusés n’ont pas pu être transportés depuis leur lieu de détention jusqu’au tribunal où a lieu le procès. C’est l’explication officielle donnée par les autorités.
Malgré tout, le procès se déroule toujours pour Asli Erdogan et pour la linguiste Necmiye Alpay, dans une toute petite salle d’audience, trop petite pour accueillir tous les soutiens de la romancière qui se relaient pour assister à la lecture de l’acte de l’accusation. Le juge a fait la lecture intégrale de l’accusation, avant très probablement, de suspendre l’audience et de convoquer les partis à une date ultérieure.
Des accusations de de liens avec le PKK
Les neuf inculpés sont accusés d’appartenir à une organisation terroriste, concrètement le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), après avoir soutenu le journal pro-kurde Özgür Gündem.
A noter qu'il n'y a aucun lien de parenté entre le président turc, Recep Tayyip Erdogan, et l'ecrivaine Asli Erdogan, accusée elle aussi d'avoir porté atteinte à « l'intégrité de l'Etat » par ses chroniques, et d'être membre d'une organisation terroriste, en l'occurrence celle des rebelles kurdes du PKK.
« Asli Erdogan a toujours été du côté des exclus. Elle publie depuis 18 ans des chroniques dans différents journaux d'opposition en Turquie et n'a jamais été condamnée une seule fois. Asli n'a pas changé. En revanche, la Turquie a changé », explique l'une de ses amies de longue date, citée par le journal Le Monde.
Trente jours de garde à vue
Arrêtée le 17 août à son domicile par des policiers cagoulés, Asli Erdogan est restée trente jours en garde à vue, dont cinq dans un isolement total. En novembre, elle a réussi à transmettre à la communauté internationale une mise en garde sur la dérive autoritaire en Turquie.
Les membres du comité de soutien exhibent des pancartes aux abords du palais de justice en gardant le silence.« Avant le début du procès, nous tiendrons une petite conférence de presse en face du tribunal de Caglayan, parce que beaucoup de personnes sont venues d'Europe jusqu'en Turquie exprès, et surtout depuis la France », note Aysegül Tozeren, une amie et membre du comité de soutien.
« Après cette conférence de presse, nous nous rendrons au palais de justice pour assister au procès. Des diplomates européens seront là, mais aussi bien sûr des écrivains et des lecteurs d'Asli en Turquie. Elle sait qu'elle est innocente, c'est une écrivaine, elle a pu choquer par ses propos, mais n'a causé aucun tort. »
« C’est une chasse aux sorcières », a écrit Asli Erdogan quelques heures avant le début de ce procès, et après avoir passé déjà 132 jours en détention provisoire.