Attentat de Berlin: le suspect tunisien était perçu comme un individu à risque

Les autorités allemandes s'activent tous azimuts pour retrouver l'homme qui était au volant, au soir du 19 décembre à Berlin, lorsqu'un camion-bélier a foncé sur la foule d'un marché de Noël, tuant au moins 12 personnes sur son passage et faisant 48 blessés. « Un soldat de l'Etat islamique », dit le groupe terroriste EI, qui a revendiqué l'attentat. La police a identifié le suspect comme un ressortissant tunisien de 24 ans, qui est activement recherché. Il était connu des autorités.

Article mis à jour jeudi 22 décembre au fil des dernières informations disponibles

Les enquêteurs allemands ont très vite reconnu qu'ils n'avaient pas d'éléments susceptibles d'établir un lien entre le premier suspect interpellé après l'attentat, un demandeur d'asile pakistanais, et les faits qui lui étaient imputés. L'homme a donc été relâché mardi, et le terroriste court toujours, potentiellement armé.

La chasse à l'homme bat son plein. La police allemande est désormais à la recherche d'un Tunisien dont le permis de séjour a été retrouvé sous le siège conducteur du camion. Il s'agit d'Anis Amri, un Tunisien de 24 ans, 1m78, environ 75 kilos. Un avis de recherche a été publié et « une récompense pouvant aller jusqu'à 100 000 euros est disponible », indique le parquet antiterroriste allemand dans un communiqué. 

Le suspect déjà connu des autorités

Anis Amri est un demandeur d'asile arrivé en juillet 2015 en Allemagne et dont la requête a été rejetée en juin. Il avait par ailleurs été condamné en Italie où il a purgé une peine de quatre ans pour l'incendie volontaire d'une école.

L'Allemagne n'est toutefois pas parvenue à le renvoyer dans son pays, la Tunisie contestant pendant plusieurs mois qu'il soit l'un de ses ressortissants. Selon les autorités allemandes, ce n'est que ce mercredi, par coïncidence, que Tunis a reconnu sa nationalité tunisienne et fourni un document de voyage permettant son expulsion.

Anis Amri est présenté par Berlin comme proche de la mouvance salafiste-islamiste. Sa photo est actuellement diffusée un peu partout dans le pays, relate notre correspondant à Berlin, Pascal Thibaut.

Un individu à risque en Allemagne

La famille d'Anis Amri et plusieurs jeunes de son âge ont été auditionnés par la brigade antiterroriste. Le jeune homme, issu d'une famille modeste, vient d'une petite ville près de Kairouan, une région de Tunisie qui était l'un des foyers du salafisme après la révolution de 2011. Selon une source sécuritaire sur place, le jeune homme était connu de la police pour vol. Il a été condamné à plusieurs années de prison pour un cambriolage, mais n'a pas effectué sa peine car il était déjà parti pour l'Italie.

En Allemagne, le jeune homme a fait l'objet d'une enquête pour « préparation d'un acte criminel grave représentant un danger pour l'Etat ». Un attentat, en somme. L'enquête a été abandonnée en septembre faute d'élements probants, mais le jeune homme était donc connu des services, placé sous surveillance pendant « l'essentiel de l'année 2016 ». Il était également soupçonné de cambriolage pour financer l'achat d'armes automatiques, notamment à Berlin, et selon le quotidien Bild, il avait même essayé de recruter des complices il y a plusieurs mois.

Le New York Times révèle par ailleurs que les autorités américaines connaissaient elles aussi Anis Amri, pour avoir été en contact avec des membres de l'organisation Etat islamique et pour ses recherches internet sur la fabrication d'explosifs. Les autorités savaient qu'il était en lien avec des membres de la mouvance salafiste. Faute de preuve et de coordination entre les administrations, il a ainsi été laissé en liberté. Et désormais, le principal suspect de l'attentat de Berlin pourrait avoir « pris le large », selon un enquêteur cité par le quotidien Die Welt.

La police tunisienne participe à l'enquête

La Tunisie se trouve donc encore une fois citée dans une affaire de terrorisme. Le pays est le plus gros pourvoyeur de jihadistes en Irak, en Syrie et en Libye, avec plus de 5 000 combattants à l'étranger. Déjà cet été, un Tunisien avait perpétré l'attentat de Nice, le soir du 14-Juillet. Et la Tunisie a été frappée plusieurs fois elle-même par l'organisation Etat islamique : au musée du Bardo ou sur la plage de Sousse, mais aussi à Ben Guerdane cette année, près de la frontière libyenne. Des attaques perpétrées par des Tunisiens et revendiquées par l'organisation EI.

A noter par ailleurs que selon l'enquête en cours, concernant les circonstances de l'attentat, le camion aurait été volé à un chauffeur polonais au moment de sa pause. Ce dernier a été retrouvé après l'attentat, mort par balle sur le siège passager de la cabine du poids lourd. Il portait sur son corps des traces de coups de couteau. L'autopsie a démontré qu'il était toujours en vie au moment où le camion a percuté la foule. Le chauffeur en titre du semi-remorque se serait battu avec le terroriste pour l'empêcher dans sa course meurtrière. Au moment où il tentait de s'enfuir, il aurait été abattu à l'aide d'une arme de petit calibre.

→ Écouter sur RFI :Nikolaus Meyer-Landrut, ambassadeur d’Allemagne en France

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