Les agriculteurs bulgares sont de plus en plus conscients de nouveaux enjeux qui se présentent à eux, comme l’obligation de préserver les ressources, l’écosystème des régions et les forêts. Mais ils soulignent aussi les impératifs sociaux qui persistent. Il s’agit d’abord de créer des emplois dans un pays qui compte 10% de chômeurs. Et puis, il faut éduquer les enfants, et notamment les enfants roms, trop souvent délaissés par l’Education nationale. C’est comme cela, disent-ils, que l’on pourra réduire la pauvreté et, de manière générale, préserver la cohésion sociale mise à rude épreuve dans la nouvelle réalité économique.
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Le passé collectiviste du pays ressurgit de manière sournoise. Presque toutes les coopératives ont disparu après la chute du communisme. Or, mutualiser les moyens par le biais d’une coopérative agricole ou d’un groupement d’agriculteurs pourrait pallier le problème de la fragmentation des sols et le manque de viabilité des fermes familiales. Mais il y a une résistance en raison du passé et un besoin d’avoir une ferme à soi, même toute petite.
Le miel bulgare dans le top 5 en Europe
Et pourtant, le pays a de nombreux atouts. On cite comme exemples le bio et le tourisme rural. Deux secteurs en plein essor. Selon les données d’Eurostat, près de 1 400 exploitations bulgares ont reçu un soutien pour la conversion en mode biologique de 2007 à 2013. Cela correspond à 7 100 hectares de terres arables. Sachant que la Bulgarie en possède un peu plus de 4 millions, c’est très peu, à peine 1,7%. Mais le secteur du bio progresse rapidement. Il s’agit notamment de fruits et légumes, mais aussi de miel, et ce n’est pas anecdotique ! La Bulgarie est dans le top 5 des apiculteurs en Europe. 5 000 à 6 000 tonnes de miel par an sont exportées, dont un tiers en bio. Avec ce bémol, toutefois : la grande qualité du miel bulgare fait qu’il est utilisé le plus souvent pour améliorer des produits provenant de l’Amérique du Sud.
C’est un véritable talon d’Achille de la Bulgarie. Certes, l’agriculture est le seul secteur excédentaire de sa balance commerciale. Le pays exporte plus de produits qu’il n’en importe. Mais il exporte surtout la matière première, comme le blé, le maïs ou le tournesol, alors que ce sont les produits transformés, comme le beurre ou les fromages, qui constituent le gros de ses importations. Et c’est un vrai problème, admettent les économistes bulgares, car quand on exporte la matière première la valeur ajoutée n’existe pas.
Voyager autrement
La Bulgarie profite du détournement d’une partie des voyageurs qui renoncent à la Tunisie ou à Paris par peur du terrorisme. L’atout de la Bulgarie : voyager autrement. Comme le souligne Lubomir Popiordanov, PDG d’une agence Odysseia – In, « il s’agit de tourisme version durable et responsable ». D’une durée de 9 à 15 jours, proposés dans les différentes régions européennes, des Rhodopes en Bulgarie au Mont Ventoux en France, en passant par l’Italie et l’île croate de Brač, ces voyages attirent des nouveaux touristes avides de vacances qui riment avec partage. Les clients logent dans des chambres d’hôtes. La cueillette des roses, l’entretien des chemins de randonnée ou la confection des plats traditionnels sont dans des programmes qui contribuent à l’économie locale.
Pour l’esprit et pour le corps
Le pays regorge d’huiles essentielles, un autre secteur en plein boom, qui attire notamment les parfumeurs français. Nous avons interrogé l’un d’eux lors d’une visite de la distillerie Galen-N située près d’une bourgade de Zeleníkovo, dans la fameuse Vallée des roses, dans le sud bulgare. « Nous sommes très satisfaits de la qualité des produits bulgares », estime Bernard Soulier, directeur scientifique chez Argeville, créateur de parfums, venu du sud de la France vérifier sur place ce que peuvent lui offrir les distilleries bulgares. « Ce sont d’ailleurs les Français qui ont contribué à la création de cette entreprise en 1957 », rappelle dans un français impeccable Momtchil Mihov, directeur des ventes de l’entreprise. A l’époque c’était une entreprise d’Etat. Son propriétaire actuel, Nicolaï Nenkov, l’a achetée depuis, et exporte presque toute sa production. Des huiles essentielles à l’usage médicinal ou dans l’industrie cosmétique. Ce que recherchent les clients, c’est la pureté des produits, la tenue impeccable des plantations et le rapport qualité/prix imbattable. C’est ce qu’ils trouvent en Bulgarie.
Avec la collaboration de Lubomir Boyadjiev