C'est encore imprécis parce que les récits des survivants sont empreints du traumatisme qu'ils ont subi. Apparemment, les passeurs ont fait converger, en pleine nuit, plusieurs petites embarcations vers un plus grand chalutier, bondé déjà de plusieurs centaines de migrants. Ils ont forcé les passagers des petits bateaux à monter à bord. Et c'est là que le drame s'est noué : surchargé, le chalutier a basculé. Le pont a pris l'eau, beaucoup sont tombés, ou ont plongé à l'eau.
41 personnes sauvées
41 Somaliens, Ethiopiens, mais aussi des Soudanais et quelques Egyptiens, qui sont parvenus à rejoindre à la nage l'un des petits bateaux à bord duquel ils avaient embarqué en Libye. Le pilote a alors démarré pour s'éloigner du naufrage, malgré les supplications des survivants qui abandonnaient parfois des membres de leur famille. C'est ce petit bateau qui a été récupéré quelques jours plus tard par un cargo. Pour l'instant, on n'a pas de trace du navire qui a coulé, pas de trace non plus des noyés qui doivent dériver au large.
La liste des naufrages de migrants est longue
C'est la sinistre ironie de l'histoire. Il y a un an, dans la nuit du 17 au 18 avril 2015, un chalutier transportant 700 personnes, principalement des Erythréens, lançait un appel de détresse au large de la Libye. Les garde-côtes italiens ont dérouté un cargo qui se trouvait dans le secteur, pour lui porter secours. Mais celui-ci est arrivé au moment où le bateau de migrants, lui aussi surchargé, chavirait et entraînait près de 700 personnes dans la mer. Seuls 28 survivants avaient pu être repêchés.
Et si on revient plusieurs années en arrière, la liste des naufrages est longue. Selon l'Organisation internationale des migrations, on compte d'ailleurs en Méditerranée plus de 5 000 morts par an.
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Des décisions prises sans grande efficacité
En Europe, on prend des décisions pour l'instant, sans grande efficacité. La politique européenne s'appuie sur deux piliers : d'abord la sécurisation de la frontière maritime. Depuis novembre 2014, une petite flotte militaire, l'opération Sophia, patrouille au large de l'Italie, pour porter assistance aux bateaux en détresse.
Elle est secondée par des bateaux affrétés par des ONG, comme SOS Méditerranée ou Médecins sans frontières, mais aussi par des navires commerciaux qui ont le devoir de se dérouter en cas d'ordre venus du centre de coordination, qui se trouve à Rome, pour secourir les naufragés.
Des mesures politiques pour décourager les migrants
Une démarche politique pour tarir le flux des migrants vers les rivages de Libye est aussi engagée. Les Européens, avec l'ONU, essayent par exemple d'asseoir l'autorité d'un gouvernement d'union nationale à Tripoli, alors que le pays est aujourd'hui tenu par des milices, aux alliances fluctuantes. C'est un effort assez compliqué, et qui pour l'instant ne donne pas beaucoup de résultats, d'autant que certaines de ces milices tirent un bénéfice financier du trafic d'êtres humains. L'idée est ensuite, une fois ce gouvernement installé, de pouvoir entrer dans les eaux libyennes, voire même d'intervenir par la force sur le rivage, pour empêcher les départs.
D'un autre côté, notamment depuis le Sommet de La Valette en novembre dernier, des accords d'assistance sont passés avec les pays de transit comme le Soudan, le Niger ou l'Ethiopie, mais aussi - et c'est plus polémique - en soutenant financièrement des régimes très autoritaires comme l'Erythrée, pour tenter de développer le marché de l'emploi sur place et, croit-on, décourager les candidats au départ.
Des séquelles psychologiques à vie
Les 41 survivants du week-end dernier sont aujourd'hui logés à l'hôtel, à Athènes, aux frais du HCR et d'une ONG locale, PRAKSIS. La plupart vont bien sûr demander l'asile en Grèce, sans être certains de pouvoir l'obtenir.
D'autres, qui ont déjà de la famille en Europe, peuvent faire une demande de regroupement familial. Et pour l'essentiel, le traumatisme est tel, ce qu'ils ont vu et vécu est si éprouvant, qu'ils vont garder, après ce véritable cauchemar qu'ils ont vécu, des séquelles psychologiques toute leur vie.
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