Avec notre envoyé spécial dans le train Vienne-Munich, Blaise Gauquelin
Dès qu’elle a su que les frontières allemandes se refermaient, la famille al-Naser a sauté dans le premier train pour l’Allemagne. Sara a 14 ans. Elle a fui l’organisation Etat islamique avec son père, son petit frère et deux petites sœurs.
Elle ne pense pas que la famille sera refoulée par les policiers allemands. « Nous avons fui Deir ez-Zor. On voyage depuis 15 jours. On veut aller à Munich puis à Berlin. Ma mère et 3 sœurs sont à Damas parce qu’on n’avait pas assez d’argent pour tout le monde. »
Le contrôleur ne s’offusque pas quand la famille al-Naser dit qu’elle n’a pas de ticket. Le père, Ibrahim, avait une très bonne situation à Deir ez-Zor. Il était ingénieur. Mais sous la tutelle des jihadistes, il ne pouvait plus travailler.
Il espère que ses compétences convaincront les Allemands de le garder lui et ses enfants, qui parlent tous un peu anglais et veulent poursuivre de longues études. Il espère surtout qu’il pourra faire venir sa femme et ses trois filles, même s'il sait que l’Allemagne va désormais se montrer moins ouverte.
Pagaille en gare de Salzbourg
Conséquence de l'instauration de contrôles aux frontières entre l'Allemagne et l'Autriche, des centaines de migrants sont coincés en gare de Salzbourg : difficile de continuer pour Munich, car les trains ne partent plus qu'au compte-goutte. Le retournement de la situation angoisse nombre d'entre eux.
Les policiers bloquent l'accès aux quais. Plusieurs centaines de migrants attendent dans le hall de la gare de pouvoir enfin monter dans le premier train qui s'annonce après plusieurs heures d'interruption du trafic. Un bénévole demande en arabe aux migrants de garder leur calme. Originaire d'Alep en Syrie, Moustafa Ambrosh semble complètement perdu dans la foule. Il serre son fils de 7 ans près de lui. « Cela fait 48h que je suis là, dit-il. Je veux aller en Allemagne. Je ne comprends pas ce qui se passe. Personne ne comprend ce qui se passe ! »
Thomas Gefahrt habite dans les environs. Il est venu avec quelques amis. Il tente de détendre l'atmosphère en occupant les enfants des migrants. « Nous sommes un groupe de scouts. On a apporté des crayons et du papier pour dessiner un peu avec les petits là. Ça va leur changer les idées ». Penchés sur leurs téléphones portables, les migrants, eux, guettent toute information nouvelle, en provenance de l'Allemagne toute proche.