Avec notre correspondante à Rome, Anne Le Nir
C’est un évènement sans précédent dans l’histoire de la République italienne. Les juges de la Cour d’assisee de Palerme se sont déplacés à Rome pour recueillir, à portes closes, le témoignage du chef de l’État Giorgio Napolitano, dans le cadre d’un procès sur les négociations secrètes entre État et mafia ouvert en mai 2013 à Palerme.
L’audition s’est tenue dans une salle palais du Quirinal, siège de la présidence de la République, littéralement blindé, et interdit d’accès aux médias. Elle a débuté à 10h mardi matin et s’est achevée à 13h30. Les déclarations de Giorgio Napolitano devraient être rendues publiques au cours des prochains jours. Il a répondu à vingt questions et aurait déclaré ne pas avoir été tenu au courant des accords « secrets » entre représentants des institutions italiennes et « dirigeants » mafieux.
Ce procès porte sur les tractations, entre des responsables gouvernementaux et la mafia sicilienne, entre 1992 et 1994. Des négociations secrètes destinées à mettre fin à la saison des attentats meurtriers. Ces derniers ayant notamment coûté la vie à deux grands juges anti-mafia : Giovanni Falcone e Paolo Borsellino.
À cette époque, l’actuel chef de l’État, Giorgio Napolitano, était président de la Chambre des députés. Raison pour laquelle les magistrats estiment que son témoignage pourrait aider à mieux faire la lumière sur les négociations secrètes. Dix personnes, dont le ministre de l'Intérieur de l'époque, Nicola Mancino, ainsi que le parrain des parrains de Cosa Nostra – la mafia sicilienne - Toto Riina, emprisonné depuis 1993, sont sur le banc des accusés. Depuis 1994, la mafia n’a plus organisé d’attentats à la bombe, mais selon les déclarations du magistrat anti-mafia Antonio Di Matteo « un retour de la violence contre les institutions italiennes, orchestré par des organisations mafieuses, ne peut être exclu ».