Avec notre correspondante à Moscou, Veronika Dorman
Pour Moscou, toutes les opérations des autorités de Kiev sont menées de concert, voire sous l’égide de Washington. Le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, a exigé, lors d'une conversation téléphonique avec son homologue américain John Kerry, que les Etats-Unis « usent de toute leur influence pour obliger le régime de Kiev sous leur coupe, qui a déclaré la guerre à son propre peuple, à cesser immédiatement ses opérations militaires dans les régions du Sud-Est ». Moscou se dit indigné du soutien que les Occidentaux apportent à Kiev, et les accuse d’être complices du crime commis par les extrémistes nationalistes à Odessa.
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Dans le même temps, le Kremlin a déclaré n’avoir quant à lui plus aucune influence sur les milices armées pro-russes dans le sud-est de l’Ukraine. Comme l’a expliqué le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, la Russie ne peut plus convaincre les insurgés à se désarmer, face à la menace directe pesant sur leur vie. Ce n’est pas la première fois que la Russie se dédouane de la sorte, en considérant que les Occidentaux doivent assumer et régler sans son aide la situation chaotique qui règne en Ukraine.
►Décryptage
L’Europe sceptique... même après la libération des membres de l'OSCE
Après une semaine de tentatives infructueuses, l’Allemagne a durci le ton par rapport à Moscou. En visite à Washington, la chancelière Angela Merkel ne s’est non seulement pas distancée de Barack Obama à propos de possibles nouvelles sanctions contre la Russie, mais elle a renchéri en soulignant que l’Europe avait déjà préparé une telle étape et était prête à la mettre en œuvre.
L’hypothèse optimiste est que Moscou a compris que son plus important partenaire en Europe était vraiment agacé et qu’il valait mieux faire un geste pour l’amadouer. Mais il y a aussi une hypothèse pessimiste. La Russie s’est peut-être rendue compte que la présence des otages à l’est de l’Ukraine rendait toute opération militaire d’envergure dans la région très risquée politiquement.
En effet, si les observateurs de l’OSCE avaient été tués pendant les combats, les ponts entre la Russie et l’Allemagne auraient risqué d’être définitivement rompus. Avec leur libération, Moscou a levé un important obstacle qui l’empêchait d’agir sur le terrain comme elle l’entendait. Mais après cette libération, le porte-parole de la mission spéciale de surveillance de l’OSCE, le Canadien Michael Bociurkiw, a souligné que malgré cette affaire l’OSCE n’avait aucune intention de se retirer de l’Ukraine, bien au contraire.
« Nous nous installons ici pour longtemps, a-t-il déclaré. Non seulement nous avons besoin d’une présence permanente pour mener de sérieux projets, mais il y a aussi trois missions spécifiques en cours. Il s’agit d’une mission d’observation militaire, d’une mission spéciale de surveillance, ainsi que d’une mission d’observation des élections vraiment importante, qui comptera presque deux mille observateurs. Quant à notre mission spéciale de surveillance, nous avons un mandat de six mois, renouvelable une fois. Le nombre des observateurs est en train d’augmenter jusqu’à 500. Dans le contexte des événements des dernières 48 heures et de l’escalade que nous constatons, nos militaires jouent un très grand rôle en tant qu’informateurs de nos pays membres sur ce qui se passe sur le terrain. Il s’agit d’un environnement vraiment plein de défis ».