Le site internet Watch The Med, vigie civile en Méditerranée

Vendredi dernier la Méditerranée s'est à nouveau transformée en cimetière après un nouveau naufrage, près de Malte, qui a encore coûté la vie à des dizaines de personnes. Alors que l’Europe et l’Italie tentent de prévenir ces tragédies, la société civile s’organise, le site internet Watch the Med dresse une carte interactive des naufrages de migrants avec la participation des internautes.

Une semaine après la mort de 359 personnes fuyant la Corne de l'Afrique, un nouveau naufrage en Méditerranée a exaspéré le Premier ministre maltais Joseph Muscat, qui en appelle à l’Union européenne.

Le flux de migrants ne tarit pas. Depuis le début de l’année, 31 000 personnes auraient traversé la Méditerranée. L’Europe annonce son nouveau programme Eurosur qui doit mutualiser les outils de surveillance maritime civils et militaires, comme les radars, les images satellites et même des drones. Un dispositif de lutte contre l’immigration clandestine « vraiment scandaleux », selon Charles Heller et Lorenzo Pezzani du centre Goldsmith, de l’université de Londres. « Plus on militarise la frontière, plus les chemins que prendront les migrants seront dangereux » estiment-ils.

Les deux universitaires ont créé le site Watch the Med qui place, sur une carte interactive, tous les naufrages en Méditerranée et révèle les nombreux cas de violations des droits de l’homme aux frontières maritimes de l’Union européenne. Le site localise, par exemple, les bateaux qui n’ont rien fait pour sauver les naufragés car les mesures italiennes interdisent de porter assistance aux embarcations ou dresse la liste des secours en mer qui ont négligé les appels par mobile des victimes, les condamnant à une mort certaine.

Témoignages des migrants

Le site dénombre, depuis 1998, environ 14 000 décès de migrants, dont 6 000 aux alentours de la Sicile. Les données qui alimentent cette carte en ligne proviennent
principalement de documents officiels comme les relevés des plateformes pétrolières offshore, du trafic des navires marchands, des bases de données de la police des frontières, des rapports des opérateurs GSM ou 3G en mer, de la couverture radar des garde-côtes italiens et des témoignages de migrants, réalisés par le HCR, l’agence des Nations unies pour les réfugiés, par exemple. Les internautes signalent aussi directement sur le site ou avec leur smartphone, tout incident en mer.

Les données cartographiques des récents drames de Lampedusa soulèvent en effet des questions. « Comment un tel drame a pu arriver si près de la côte ? Pourquoi ce bateau n'a-t-il pas été détecté par les garde-côtes, les radars, ou la surveillance aérienne ? Pourquoi les secours, selon certains témoignages, ont mis 45 minutes pour arriver sur le lieu du naufrage, aussi proche du port ? ». Watch the Med mène l'enquête pour que la Méditerranée ne devienne pas le plus grand cimetière de migrants au monde.

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