Avec notre correspondante à Moscou, Anastasia Becchio
Serguei Gouriev n’a rien d’un opposant farouche au Kremlin. Economiste de renom, recteur de l'un des établissements russes les plus réputés à l’étranger, l’homme n’a toutefois jamais caché ses sympathies pour l’opposition libérale et en particulier pour Alexei Nalavny. Il a récemment versé de l’argent à son fonds de lutte contre la corruption et aurait même commencé à rédiger le programme économique de l’opposant, qui ambitionne un jour de devenir président.
Mais le départ de Serguei Gouriev pourrait aussi être lié à un autre dossier brûlant : l’affaire Ioukos. En 2011, après la deuxième condamnation de Mikhail Khodorkovski et Platon Lebedev, le Conseil pour les droits de l'homme du Kremlin l’avait chargé, avec d’autres experts, d'étudier le bien-fondé de ce deuxième jugement qui avait rallongé la peine de l’ancien patron du groupe pétrolier Ioukos et de son associé. Il avait alors conclu que ce jugement était infondé, les preuves de la culpabilité des deux hommes n’ayant pas été établies.
Récemment, Serguei Gouriev a été entendu dans le cadre de cette affaire. Selon les médias, les enquêteurs soupçonnent l’économiste d'avoir reçu de l'argent de l'étranger pour présenter une conclusion favorable à Mikhail Khodorkovski. Le principal intéressé s’abstient de tout commentaire. Les éditorialistes libéraux, eux, voient dans cet exil un signal très négatif : pour le journal Forbes, c'est une véritable catastrophe intellectuelle qui guette aujourd’hui le régime.