Abdullah Öcalan: trente ans de lutte au nom du peuple kurde

Du fond de sa cellule où il est détenu depuis plus de dix ans, Abdullah Öcalan devrait annoncer un cessez-le-feu avec Ankara. Après trente années de lutte armée et de combat idéologique acharné, le leader du parti kurde appelle à déposer les armes.

Né en 1949 dans une famille modeste d'une mère turque et d'un père kurde, Abdullah Öcalan est, dès l’âge de 20 ans, un sympathisant des courants religieux islamistes. Mais durant ses études en école de cadastre puis en sciences politiques à l'université d'Ankara, il est séduit par les idées démocratiques et révolutionnaires maoïstes. Abdullah Öcalan grandit durant les années 1970 et voit fleurir en Turquie des mouvements politiques populaires très puissants. Rapidement, en 1972, il découvre la prison après avoir participer à des manifestations populaires. Sa détention lui permet de revoir sa conception politique, d’étudier et d’analyser différentes conceptions idéologiques.

1978, fondation du PKK

Ses idées révolutionnaires se répandent dans le milieu estudiantin turc et dans la population du sud-est de la Turquie. En 1978, face à l’Etat turc, Abdullah Öcalan fonde le PKK, Parti des travailleurs du Kurdistan. Il en devient le chef. Face à l’interdiction d’emprunter la voie politique pour répandre ses revendications, le PKK se lance dans la lutte armée dès 1984. S’en suivent en 1990 des soulèvements populaires qui se transforment en guerre sans précédent dans le pays. Les trois trêves proposées par Abdullah Öcalan s’avèrent vaines, d’autant plus qu’elles demeurent toutes unilatérales, les autorités turques refusant toute négociation avec le mouvement.

Rapidement, son organisation est considérée par les autorités turques comme terroriste. Les Etats-Unis et l’Union européenne inscrivent également le PKK à leur liste de mouvements terroristes.

La lutte se poursuit durant son exil

Devant cette impasse, Abdullah Öcalan s’exile en Europe d’où il poursuit sa lutte. Chef autoritaire incontesté, il utilise des méthodes de guérilla pour défendre ses idées. Nombre de ses dissidents sont assassinés sauvagement.

1999 est une année charnière. Abdullah Öcalan est capturé par les services secrets turcs alors qu’il est au Kenya. Jugé pour trahison à la nation, il est condamné à mort, peine transformée en prison à vie en 2002 (lors de l’abolition de la peine capitale en Turquie).

Depuis son emprisonnement sur l’île prison d’Imrali, en mer de Marmara, de nombreuses organisations de défense des droits de l’homme dénoncent les pressions psychologiques subies par le leader kurde.

« Apo » demeure incontournable pour Ankara

Mais « Apo » (oncle), comme on l’appelle aussi, poursuit sa lutte et sait qu’il demeure incontournable dans toute négociation de paix avec l’Etat turc.

Aujourd’hui, Abdullah Öcalan, du fond de sa cellule mais toujours à la tête de la guérilla marxiste-léniniste, vient de faire « une déclaration historique », un appel au cessez-le-feu. Un discours qui doit mettre fin à trente ans d'une guerre qui a fait plus de 45 000 morts et un million de déplacés.

Celui dont le nom signifie « celui qui se venge » en turc sera-t-il l’instaurateur de la paix tant attendue entre Ankara et le peuple kurde de Turquie dont il est le symbole ?

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