Une enquête du Financial Times dresse un bilan accablant des fonds d’aide européens aux régions économiquement sinistrées. Des documents internes de la Commission européenne, obtenus par le quotidien britannique, montrent que l'UE rencontre des difficultés à récupérer les sommes promises par les Etats membres pour les fonds d’aide aux régions les plus pauvres. Résultat, l’UE n'a versé que 10% des 347 milliards d'euros théoriquement alloués jusqu’en 2013. Le dispositif prévoit en effet un déblocage des fonds de l’Union seulement si les autorités nationales concernées contribuent de leur côté au financement des projets retenus, à hauteur de la moitié de ce financement. Concrètement, pour chaque euro de Bruxelles, le pays concerné doit mettre un euro de sa poche.
Mais avec la crise, les financements complémentaires ne viennent pas. Alors qu’on est au milieu du cycle 2007-2013, l’Union européenne n’a reçu que 35 milliards sur les 347 milliards d’euros prévus. A court de trésorerie, les Etats membres n’arrivent pas à trouver les ressources nécessaires pour effectuer les versements. De l’avis de Pia Ahrenkilde-Hanse, la porte-parole de la Commission européenne, « le démarrage lent en début de cycle de financement est assez normal. L’actuel cycle de financement des fonds européens est prévu pour la période 2007-2013. Mais jusqu’en 2009, les Etats européens dépensaient encore de l’argent du cycle précédent: 2000-2006 ».
Des aides destinées aux PME
Ces fonds qui visent à réduire les disparités économiques et sociales entre régions d’Europe, constituent désormais le premier poste budgétaire de l’UE. Ils dépassent désormais les montants consacrés à la Politique agricole commune (PAC). Les dépenses de la politique régionale de l’UE sont ventilées via trois fonds, appelés « fonds structurels ». Le plus important est le Fonds européen de développement régional (FEDER) qui soutient la création d’infrastructures et d’investissements productifs. Le Fonds social européen (FSE) verse de l’argent pour l’emploi et la formation. Enfin, le Fonds de cohésion apporte un soutien supplémentaire aux régions les plus pauvres.
De l'économie à l'environnement en passant par la formation, les transports ou les technologies de l'information et de la communication, de très nombreux domaines sont concernés, en zones rurales comme en zones urbaines, par ces fonds destinés à aider en priorité les petites et moyennes entreprises. Mais si l’on en croit le Financial Times, des multinationales comme Coca-Cola, IBM ou Nokia auraient profité à tort de ces aides, parfois par le biais de leurs filiales ou de leurs sous-traitants. Des organisations criminelles comme la mafia italienne en auraient également bénéficié.
Irrégularités et fraudes
L’octroi de ces fonds est d’une telle complexité qu’il est parfois difficile pour la Commission de faire la différence entre les vrais méritants et les faux méritants. Selon Pia Ahrenkilde-Hanse « des irrégularités et des fraudes existent. Mais le taux d’erreur a été réduit de moitié en 2009, à environ 5% et seuls 0,2% sont imputables à des fraudes ».
L’enquête du Financial Times pointe également de nombreux problèmes dans l’usage de ces fonds. Une étude interne de la Commission publiée le mois dernier s’interrogeait déjà sur le dispositif actuel. « Nous devons allouer ces fonds de manière plus intelligente et introduire des conditions d’octroi plus strictes comme notamment la notion de performance qui établit un lien entre allocations financières et résultats », avait plaidé le 10 novembre dernier, le Commissaire à la politique régionale, Johannes Hahn. Bruxelles devrait notamment simplifier les procédures et améliorer la formation des personnels chargés de les gérer.