À la Une: pression maximale à Hong Kong

« La scène semble sortie d’un film de Bruce Lee, s’exclame Le Figaro. Dribblant les projecteurs de police striant la nuit de Hong Kong, des corps frêles bravent l’apesanteur, en s’agrippant à des cordes, au-dessus d’une passerelle d’autoroute. Ils descendent en rappel à la hâte, suspendus dans la jungle urbaine, et sautent sur le macadam. Là, une moto surgit et embarque les fugitifs, prenant la police antiémeute de vitesse, pour disparaître sur la bretelle d’autoroute, slalomant entre les gratte-ciel de Kowloon. Grâce à cette manœuvre culottée, une poignée d’étudiants ont réussi à s’échapper hier soir du campus de l’université polytechnique de Hong Kong, assiégé par les forces de l’ordre, nouvel abcès de fixation dans la grave crise politique qui agite l’ancienne colonie britannique depuis six mois. »

Commentaire du Figaro : « La crise à Hong Kong semble approcher d’un dangereux point de rupture. Des menaces de couvre-feu et de tirs à balle réelle sont brandies par la police alors que les manifestants armés de briques, d’arcs et de flèches durcissent la confrontation. Un règlement de comptes façon OK Corral se profile autour de l’université polytechnique : s’il s’agit du dernier acte de la révolte entamée il y a six mois, Pékin est bien parti pour l’emporter. »

En effet, pointe encore Le Figaro, « la stratégie du boa constrictor a porté ses fruits. Des quelque deux millions de Hong­kongais qui défilaient en juin pour la défense de la démocratie, il ne reste que cinq ou six cents jeunes radicalisés, encerclés dans une nasse où les renvoient les forces de l’ordre lorsqu’ils tentent de s’en échapper. »

Pékin prêt à intervenir

Désormais, relève Libération, « le spectre d’une intervention de l’armée chinoise sur le territoire hongkongais, et d’un remake du massacre du mouvement démocratique de Pékin sur la place Tiananmen en 1989, impensable il y a quelques semaines, est dans toutes les têtes. Hier lundi, l’ambassadeur chinois à Londres, Liu Xiaoming, a prévenu que Pékin ne "resterait pas sans rien faire" si la situation devenait "incontrôlable". La sortie dans les rues, samedi, de soldats chinois de la garnison locale de l’Armée populaire de Chine, un fait rarissime, a sonné comme un avertissement. La police a également annoncé qu’elle tirerait à "balle réelle", et ostensiblement sorti ses fusils AR15. (…) Selon le professeur de sciences politiques Chow Po Chung, interviewé par Libération, cette stratégie d’escalade pourrait avoir pour but l’annulation des élections locales prévues le 24 novembre : des centaines de jeunes issus du mouvement pro-démocratie s’y présentent. S’ils l’emportent, ils auront le pouvoir d’élire le chef de l’exécutif. Ce que Pékin veut à tout prix éviter. »

La pression monte aussi en Irak…

On reste avec Libération qui nous emmène sur un autre lieu de contestation : Bagdad, la capitale irakienne, dont le centre est occupé depuis maintenant un mois par des milliers de protestataires.

Des centaines de tentes ont été dressées : un « campement géant, en plein cœur de Bagdad, soustrait à la circulation automobile comme à la présence policière, relate le journal. De la grande place Tahrir qui n’a jamais mieux porté son nom de "libération", il déborde sur les avenues, les jardins et les souterrains environnants. Des milliers de protestataires occupent les lieux en permanence. Des dizaines de milliers d’autres, engagés ou soutenant le mouvement, y passent tous les jours. Entrée dans sa quatrième semaine, la contestation en Irak ne cesse de gagner du terrain, du soutien et de la détermination, rapporte encore Libération. La grève générale de dimanche a été très largement suivie par les fonctionnaires, étudiants, enseignants et les professions libérales qui ont grossi les rangs des manifestants, à Bagdad comme dans d’autres villes du sud du pays. »

L’exaspération des Irakiens est facile à comprendre, pointe Libération : « Seize ans après la chute de Saddam Hussein, deux guerres civiles, des attentats à répétition, plus meurtriers les uns que les autres, le retrait des troupes américaines en 2011, une occupation partielle du territoire par l’État islamique, des gouvernements plus ou moins fantoches et en tout cas défaillants et corrompus, le peuple irakien se retrouve derrière ce slogan : "On veut un pays." Une revendication à la fois simple et vertigineuse, s’exclame Libération. Simple au point de rassembler au-delà des clivages communautaires entre sunnites et chiites qui structurent pourtant le pays. Simple au point de vaincre la peur de la répression du régime. Simple au point de mettre à distance les deux puissances qui ne sont jamais loin du théâtre irakien : les États-Unis et l’Iran. Vertigineuse tant le chemin vers la constitution d’un État libre et indépendant semble pavé d’obstacles. Vertigineuse tant on se demande justement quel rôle les deux puissances en question jouent ou s’apprêtent à jouer devant ce printemps en novembre. »

Le drame de Mirepoix-sur-Tarn

En France, « pont mortel », lance Le Midi libre en première page avec cette photo saisissante du pont suspendu de Mirepoix-sur-Tarn qui s’est effondré hier, faisant deux morts.

« Des tonnes de gravats qui gisent dans l’eau, relate La Dépêche du Midi, des câbles qui pendent dans le vide et un ouvrage de béton dispersé comme un fragile château de cartes. Il y a aussi ces bataillons de secouristes qui vont et viennent sous le regard des habitants incrédules. C’est à une véritable scène de désolation que l’on assiste à Mirepoix-sur-Tarn, en Haute-Garonne. »

« A qui la faute ? », s’interroge La Dépêche. Il y a peut-être la vétusté du pont construit en 1931, mais aussi et surtout le poids-lourd de 44 tonnes qui s’est engagé sur l’ouvrage, alors que son accès était interdit aux véhicules de plus de 19 tonnes…

Il n’empêche, certains commentateurs voient dans ce drame comme le signe d’une certaine déliquescence de l’État…

« La rupture de Mirepoix ne doit pas être réduite à un drame isolé ou à l’erreur éventuelle d’un individu, affirme ainsi Le Courrier picard. Au-delà du symbole facile d’un pays qui se lézarde, elle est une nouvelle alerte majeure. Comme une société, un pont repose sur de solides fondations, des piliers résistants, et un tablier stable. Pour tenir ensemble face aux aléas, tout est conçu avec des marges de tolérance. Quand elles n’existent plus, la priorité est d’agir vite pour réparer ce qui flanche avant qu’il ne soit trop tard… »

Les Dernières Nouvelles d’Alsace renchérissent : « Le symbole du pont rompu reste d’une portée émotionnelle forte. L’effet est ravageur sur ceux qui doutent de l’implication de l’État dans les affaires locales. Les maires n’ont de cesse de regretter leur impuissance à traiter tous les dossiers échoués sur leurs bureaux. Une catastrophe comme celle arrivée sur le Tarn contribue à nourrir la conviction qu’un fossé sépare deux rives de la République. D’un côté, l’Élysée intouchable, où tout se décide. De l’autre, les mairies au contact des faits, où toute la vie citoyenne se cristallise. »

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