A la Une : la réplique du peuple algérien

Après la nomination contestée d’Abdelkader Bensalah comme président par intérim et malgré l’annonce par celui-ci hier de la tenue d’une présidentielle le 4 juillet, les algériens ne décolèrent pas.

Ainsi, constate Le Monde Afrique, « des milliers de manifestants, enseignants, étudiants, médecins, gardés par un important dispositif policier, se sont à nouveau rassemblés hier à la mi-journée, près de la Grande Poste à Alger, cœur de la contestation qui ébranle le pays depuis sept semaines. Un appel à la grève nationale a ainsi été lancé. Tous rejettent Abdelkader Bensalah, qui a été un partisan d’un cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika et qui est pour les manifestants une incarnation du régime en place. »

« Apprenez à dire non ! »

Le site d’information algérien TSA était sur place : « 'Bensalah dégage !' est le slogan le plus partagé à la place de la Grande Poste par les manifestants, rapporte TSA. Certains dénoncent le recours de la police à la manière forte contre les étudiants et contre les syndicalistes. 'Comment, hier, vous étiez avec nous et aujourd’hui vous nous frappez ?', s’interroge, en colère, un enseignant en s’adressant à des policiers empêchant le passage des manifestants vers le lieu de rassemblement. 'Mais, apprenez à dire Non, prenez position, vous êtes avec nous !', insiste-t-il. Les policiers restent imperturbables. (…) Une universitaire d’Alger intervient alors, relate encore TSA, pour dire que les algériens ne craignent pas la répression. 'Cela fait vingt ans qu’ils répriment, à quoi cela a-t-il servi ? Sommes-nous revenus en arrière ? Non. Ils se trompent lourdement. Désormais, nous ne reconnaissons ni Bensalah, ni le gouvernement Bedoui, ni les deux chambres du Parlement ni le Conseil constitutionnel. Qu’ils partent tous'. »

Le dispositif policier déployé à Alger hier était impressionnant, rapporte Liberté . « Des groupes de manifestants en provenance de la Place du 1er Mai ont été empêchés de rejoindre la foule cantonnée à la Grande Poste. Les forces de l’ordre, qui ont utilisé des gaz lacrymogène et des canons à eau pour disperser la foule, ont fini par laisser faire, pointe Liberté, notamment à hauteur de la Place Audin, où le cordon sécuritaire a été levé à partir de midi. La détermination des manifestants a eu visiblement raison de la répression policière. »

L’armée à la manœuvre…

Pour sa part, pointe El Watan, « le chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah, a réitéré, hier à Oran, l’attachement de l’ANP à l’application des dispositions prévues dans la Constitution dans la gestion de la période de transition. Le vice-ministre de la Défense a réaffirmé son 'engagement personnel' à soutenir le peuple et a accusé des parties étrangères de comploter contre l’Algérie. »

Le Matin d’Algérie s’insurge contre ces déclarations : « donc cette période de transition se fera selon les plans de l’armée avec ce gouvernement et ce président par intérim, dénoncés par des millions d’Algériens. Exit donc les revendications populaires et celles de la société civile. » Et puis « qui sont ces 'parties étrangères' ? Ou ces 'personnes' qui voudraient du mal au pays ? Ce sont ces millions d’Algériens qui recouvrent leur droit à la souveraineté ? Mystère ! »

La bourrasque va-t-elle souffler à nouveau ?

En effet, renchérit Aujourd’hui  à Ouagadougou, « qui le général Gaïd Salah accuse-t-il ? Quel pays qui a 'un passif avec l’Algérie' veut semer la zizanie ? La France ? Gaïd ne le dit pas, estimant que les intéressés se reconnaîtront. Avec cette sortie tonitruante, le général tombe bas les masques : il n’a pas fait de pronunciamiento ni de coup d’Etat, mais le voilà maître de l’Algérie. Il prouve si besoin était que le système Boutef repose sur le FLN, mais surtout sur les militaires. »

En fait, complète Le Pays, toujours au Burkina, « l’armée a récupéré la révolution populaire pour toujours garder la haute main sur le pouvoir. Mais il est difficile de croire que la rue algérienne se contentera du simple rôle d’accompagnant du plan ourdi par l’armée, estime Le Pays. Les manifestations risquent de gagner sans nul doute en ampleur. L’armée et son faire-valoir tiendront-ils face à la bourrasque qui a emporté Abdelaziz Bouteflika ? »

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