À cette question on peut répondre qu’elles sont sérieusement divergentes, mais pas totalement antagonistes. Divergentes, oui, et de plus en plus. Emmanuel Macron croit aux vertus du multilatéralisme, c’est-à-dire à la coopération économique, culturelle et diplomatique des nations. Pour arriver à trouver des compromis, plutôt que d’exacerber des tensions qui peuvent mal tourner, l’histoire l’a souvent montré.
Lucide, Emmanuel Macron reconnaît que l’ordre multilatéral et l’idéal universaliste élaborés en 1945 sur les ruines de la Seconde Guerre mondiale sont aujourd’hui en crise. L’éclatement des blocs qui se faisaient face et la montée en puissance d’organisations non étatiques, criminogènes et/ou anti-occidentales et radicales, ont changé la donne.
Les institutions internationales, chargées de réguler, d’encadrer les passions humaines et les intérêts divergents des puissances, apparaissent de plus en plus surannées ou impuissantes – ou les deux. À commencer bien sûr par l’ONU, qui à 70 ans, est un peu comme une vieille dame qui ne comprend plus le monde dans lequel elle évolue.
Les différentes options
Voilà pour le constat. Alors que faire ? Soit, explique Emmanuel Macron, on pense que c’est un mauvais moment à passer et que tout rentrera dans l’ordre. Illusion selon lui. Soit on passe à la loi du plus fort, exercée donc par le plus fort – suivez son regard, les États-Unis de Donald Trump. Mais cela conduit pour le chef de l’Etat « au repli et au conflit ».
Soit – et c’est le choix du dirigeant français, on cherche à rebâtir un nouvel équilibre mondial, basé à la fois sur le respect des souverainetés et sur le renforcement des coopérations régionales. Autant dire que ce n’est pas la lecture de Donald Trump. Élu à un moment où le leadership américain est menacé par de nouvelles grandes puissances, il pense que c’est le multilatéralisme excessif qui a affaibli les États-Unis. Il entend donc revenir à une vieille tradition d’unilatéralisme, l’Amérique d’abord. Une Amérique non pas isolée, mais qui s’occupe prioritairement de son développement interne, et qui à l’extérieur se désengage d’organismes universels qui lui volent son argent et son énergie.
Négociation en face à face
Désormais ce sera de la négociation en face à face, avec tel ou tel pays. Pari gagnant puisque les États unis sont toujours plus puissants que leur interlocuteur. D’où les coups de gueule de Donald Trump contre l’ONU et ses diverses organisations, d’où la renégociation féroce d’accords commerciaux jugés préjudiciables aux intérêts des Etats-Unis. D’où la recherche de nouveaux ennemis, qu’on affaiblit d’abord, avec qui on négocie ensuite – à son avantage. Cela pourrait marcher avec la Corée du Nord, c’est bien plus compliqué avec l’Iran.
Deux visions du monde - la française et l’américaine -, qui s’opposent donc fortement à court terme, mais qui peuvent ne pas être antagonistes sur l’objectif final – par exemple empêcher l’Iran de devenir une puissance nucléaire. C’est du moins ce qu’il faut espérer.