Un grenier sans graines, une poule qui n'a rien à manger ; dans la cour de sa grande maison de notable, Fessaye manie la métaphore pour tenter de décrire la situation de sa ville, Zala Anbesa, une cité du nord de l'Éthiopie de quelques milliers d'habitants, autrefois prospère. « Le peuple de Zala Anbesa était travailleur. Avec le transit depuis le port de Massawa, tout le monde avait du travail. » Massawa, sur la côte de la Mer Rouge, n'est qu'à environ 150 kilomètres. Asmara, la capitale érythréenne est à 100 km.
Zala Anbesa se trouve pile sur la frontière disputée. Ici, pas d'activité, pas de banques. Certains jeunes sont partis en Europe, dans les pays du Golfe. La ville d'Adigrat, elle, a grossi avec les déplacés, des habitants qui ont décidé de s'éloigner un peu de la frontière, où les combats reprennent parfois. La ville n'est pourtant pas épargnée par le marasme, explique Alem, un commerçant. « Après la guerre, beaucoup de commerçants d'Adigrat sont partis à Addis-Abeba, à Mekelle et ailleurs, dit-il. Tous les grands marchands sont partis. L'université a heureusement amené un peu de mouvement. »
Les ports de Massawa et d’Assab peut-être bientôt au service du commerce extérieur de l’Éthiopie.
Tesfalidet, lui, gère une entreprise d'importation de verre pour la construction. Si la paix revient, la route vers Asmara puis Massawa sera rouverte, espère-t-il. Et cela ne pourrait qu'être bénéfique : « A mon avis, mon entreprise peut devenir 3 ou 4 fois plus grosse. Premièrement, j'amène les affaires de Djibouti. Djibouti c'est loin. On paye les taxes et il y a le transport. Il faut passer par Addis-Abeba. J'importe des vitres donc c'est fragile, ça peut casser. Mais avec la paix on pourrait importer depuis le port de Massawa. C'est plus simple. Ce serait le jour et la nuit par rapport à aujourd'hui, au niveau du profit et de la rapidité. »
L'Éthiopie pourrait aussi viser le port d'Assab. Pour le moment, 90% du commerce extérieur du pays enclavé passe par Djibouti.