Les prix du manioc payés au producteur se sont effondrés cette année, tant les quantités de racines sont abondantes. A peine 30 francs CFA le kilo (moins de 5 centimes d'euros), contre près du double l'an dernier. La surproduction s'explique par l'engouement des producteurs pour cette culture, après la flambée des prix l'an dernier, suite à la sécheresse de 2016. Le gouvernement de Côte d'Ivoire s'interrogeait même jusqu'alors sur l'opportunité d'intensifier la production et la transformation du manioc. En résumé, d'industrialiser la filière.
Tous petits producteurs et transformateurs
Car l'appétit pour le manioc augmente en Côte d'Ivoire et à l'international. La consommation de pâte de manioc et d'attiéké, la semoule au goût légèrement amer, progresse dans les villes. Et les exportations génèrent 7% de la valeur ajoutée. Pourtant la filière est restée largement artisanale. Le manioc est cultivé par de très petits producteurs. Des productrices majoritairement, c'est une affaire de femmes. Elles cultivent le manioc parfois sur un demi-hectare, les jeunes les aident ponctuellement pour les travaux difficiles. La transformation est elle aussi le plus souvent artisanale. Et la commercialisation, majoritairement le fait de commerçantes individuelles.
Industrialisation peu rentable
Les projets d'industrialisation pour l'instant tournent court. Seuls 2 à 5% des volumes passent par de grandes unités de transformation, dans la région de Yamoussoukro, où il reste des champs de manioc. Plus difficile d'implanter des unités industrielles proches du premier bassin de consommation, la région d'Abidjan : le manioc a disparu, chassé par la pression immobilière et les plantations de cacao ou de palmiers à huile.
500 000 emplois temps plein aujourd’hui
Les frais de transport rendent de ce fait le modèle industriel peu rentable d'autant qu'il faut contractualiser avec des milliers de petits producteurs. Nestlé a ainsi mis fin à son expérience de transformation du manioc en amidon alimentaire. Les experts du CIRAD préconisent plutôt de renforcer la filière artisanale, parce qu'elle est dynamique, à peu près rentable, et grande pourvoyeuse d'emplois ruraux. Près de 500 000 équivalents temps plein sur toute la chaîne.