Etats-Unis: Donald Trump a-t-il réussi son premier discours sur l'état de l'Union?

Comme chaque vendredi, nous retrouvons Bruno Daroux pour sa chronique, Le Monde en Questions. Aujourd'hui, la question posée est la suivante : Donald Trump a-t-il réussi son premier discours sur l'état de l'Union, passage annuel obligé pour tous les présidents américains ?

Et bien la réponse peut-être oui sur la forme, et plutôt non sur le fond. Sur la forme, cet utilisateur compulsif de tweets souvent rageurs et conflictuels a présenté devant la représentation nationale de son pays un visage qui se voulait serein. Mardi soir, Donald Trump ne fut pas transgressif. Prompteur aidant, avec une force qui se voulait tranquille, mettant en avant de chaque chapitre de son discours des héros ordinaires de l'Amérique qui souffre, se dévoue ou se montre héroïque, il a donc égrené, comme l'impose l'exercice, les thèmes de politique intérieure et extérieure qui lui sont chers. D'un point de vue formel, performance plutôt réussie, Donald Trump est, aussi, un homme de spectacle.

Quitus sur la forme donc, mais sur le fond, le président des États-Unis
persiste et signe

Les termes choisis étaient plus policés qu'en mode tweet, le ton se voulait apaisé, voire rassembleur. Mais les fondamentaux de son conservatisme populiste étaient là - et bien là. Donald Trump ne lâche rien. Entre premier bilan et perspectives pour l'année à venir, son discours était clair : l'union se porte bien ! Et d'abord l'économie : les indicateurs sont au vert - ce qui n'est pas faux mais ce qui est aussi à porter au crédit de son prédécesseur. Mais Barack Obama, bien sûr, ne fut jamais cité. Ou alors en creux, pour le tacler : « l'ère du déclin économique est terminée » dixit Trump. Avec l'autre, le pessimisme régnait - avec lui, l'optimisme est de retour, c'est même « le nouveau moment américain ». Autosatisfaction encore sur la réforme fiscale, les emplois et les entreprises qui reviennent aux États-Unis.

Et puis arrive le dossier qui fâche : la réforme de la politique migratoire

Trump, presque mielleux, en appelle à l'esprit de responsabilité des élus démocrates, sur le mode : j'ai besoin de vous les gars. Dans la pure tradition de la démocratie de marchandage étasunienne, il leur propose un deal : je régularise presque deux millions de clandestins, et vous me financez mon grand mur à 25 milliards de dollars le long de la frontière avec le Mexique... et là, le flop. Les mines démocrates restèrent obstinément renfrognées.

Quant à la politique étrangère, elle fut expédiée en fin de discours

Rien de nouveau à noter. Sauf cette phrase à l'encontre des pays que les États-Unis soutiennent financièrement : « l'aide américaine doit profiter aux amis des USA, pas à leurs ennemis ». À bon entendeur...

Pas un mot en revanche sur la question qui menace Donald Trump. Celle de ses accointances supposées avec des émissaires russes pendant la campagne électorale pour discréditer son adversaire démocrate Hilary Clinton.

Alors ? Et bien au final, Donald Trump a formellement réussi sa prestation. Mais, une nouvelle fois, il a choisi de parler d'abord à son électorat. Comme l'écrivait le New York Times jeudi, « Trump a le triste mérite de sortir des millions d'Américains de leur apathie civique. Et c'est donc avec une gratitude ambiguë que nous devrions tous le remercier, au moins pour ça ». Drôle de réussite...

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