A la Une: le monde selon Emmanuel Macron

« La France n’est pas le nombril du monde mais se verrait bien, à tout le moins, en tête pensante, relève La Croix. Une tête qui aurait tous les traits d’un Emmanuel Macron très en verve hier, lors de son premier discours de politique étrangère devant les ambassadeurs français. Les propositions se déploient sur tous les fronts : un nouveau sommet international sur le climat en décembre, un prochain déplacement en Afrique pour constituer un 'axe intégré' entre l’Afrique et l’Europe sur la crise migratoire, des initiatives fin septembre pour consolider le projet européen… Cet allant présidentiel pour la chose diplomatique s’inscrit dans une ambition affichée bien avant son élection » : faire reprendre à la France son rang parmi les nations. Certes, poursuit La Croix, « La France n’est pas un 'petit' pays ; elle n’est pas non plus une super puissance. Son histoire, sa culture lui confèrent une parole singulière, certes. Mais sa 'grandeur' se joue d’abord ailleurs, estime le quotidien catholique. Sur la scène intérieure, avec une économie assainie et une confiance en l’avenir retrouvée. La France n’est grande que si les Français se sentent à la hauteur. Ce pari-là mérite autant d’énergie et de persévérance. »

Analyse similaire pour Le FigaroLe Figaro qui salue la « diplomatie de combat  » menée par Emmanuel Macron ainsi que sa « fraîcheur diplomatique saluée à l’étranger », mais, souligne le quotidien de droite, « le président français ne sera réellement crédible sur la scène internationale que s’il réussit dans ses frontières les réformes tant attendues. Le rang de la France dans le monde se joue aussi autour du Code du travail ou de la réduction des déficits… »

Une politique autrement ?

Ce qui nous amène à la politique intérieure avec cette rentrée sociale chargée… Et tout d’abord la fameuse réforme du code du travail, dont les ordonnances seront présentées demain jeudi. Ce sera le moment de vérité, pour Les Echos. « Trois mois après l’élection de mai, ce jeudi donnera le premier vrai début de réponse à la question qui a porté une majorité de ses électeurs de la présidentielle, pointe le quotidien économique. Emmanuel Macron va-t-il faire de la 'politique autrement' ou bien laissera-t-il l’expression à son état de formule creuse ? S’il parvient à obtenir la bienveillance de la CFDT et de FO, s’il parvient à montrer que le gouvernement a écouté, voire co-construit le texte final sans en dénaturer le sens, alors, estiment Les Echos, la méthode méritera grande attention. Car elle est neuve. Peu de grand-messes, pléthore de réunions techniques, un mélange de secret et de confiance à l’endroit des acteurs sociaux. Le processus Pénicaud aura permis de réussir là où Hollande, qui en faisait pourtant un objectif prioritaire, a échoué. De casser la fausse dramaturgie sociale pour redonner corps au vrai dialogue. »

Attention, prévient pour sa part L’Est Républicain, « si la route semble dégagée pour Emmanuel Macron, le terrain social reste toutefois des plus glissants, et la moindre clause d’ordonnance mal tournée est susceptible de provoquer l’étincelle. Le défi va consister pour le gouvernement à rendre une copie qui ne mette pas le feu aux poudres, tout en évitant de sombrer à l’inverse dans un consensus mou, au risque d’accoucher d’un texte n’ayant plus de réforme que le nom. »

En tout cas, « la condition première des réformes, c’est l’éthique », avance Ouest France : « comment accepter de faire des efforts, lorsque s’impose pour les citoyens ordinaires le sentiment qu’ils ne sont pas réellement égaux par rapport à ceux qui, de petits arrangements en grandes tricheries, profitent de la situation pour s’enrichir ? Certes, il incombe à ceux qui nous gouvernent de travailler à la reconstruction du pacte éthique, mais ils n’y parviendront pas sans le concours de tous, prévient Ouest France, et en premier lieu, celui, indispensable, des plus riches. Faute de cela, la démocratie se videra de son sang. »

Des riches toujours plus avides…

Justement, les plus riches sont à la Une de LibérationLibération qui constate que « 40 milliards d’euros ont été redistribués aux actionnaires des grandes entreprises au second trimestre en France : record d’Europe. Le tout, estime le journal, au détriment des salariés et de l’investissement. »

Libération qui dénonce dans son éditorial, « l’avidité, puissant moteur de la classe dirigeante. (…) Depuis la mise en place des politiques reaganiennes, les salaires ont stagné et les revenus du capital se sont envolés, soupire le journal. Plus étonnant encore : c’est en France, ce vieux pays catholique soi-disant rétif à l’argent, cette économie socialisante où l’on décourage soi-disant les entrepreneurs, que les dividendes distribués par les grandes entreprises sont en proportion les plus élevés : quelque 44 % des bénéfices, une proportion qui handicape l’investissement et rabote, évidemment, la hausse des salaires. »

Finalement, pointe encore Libération, « la hausse des revenus d’en haut ne favorise en rien la croissance ; elle empêche les salaires de progresser, freinant la consommation et creusant l’écart entre petits et gros. On s’étonne ensuite de la persistance de la 'fracture sociale', du désarroi des classes moyennes et de la montée des populismes. La leçon est toujours la même, conclut Libé : sans une vigoureuse régulation, le capitalisme est une machine folle. »

Du politique au journalisme et inversement…

Enfin, le chassé-croisé des hommes politiques et des journalistes… C’est bien connu, en France, la frontière entre monde politique et monde journalistique est pour le moins poreuse…

Plusieurs responsables politiques passent de l’autre côté du micro, constate Le Monde : Henri Guaino sur Sud Radio ; Jean-Pierre Raffarin sur France 2 ; Julien Dray sur LCI ; Aurélie Filippetti sur RTL ; Axelle Lemaire sur France Culture… la liste est longue…

Et dans l’autre sens, l’éditorialiste du magazine Challenges, Bruno Roger-Petit est nommé porte-parole de l’Elysée… Bruno Roger-Petit qui a droit ce matin à deux pages caustiques dans Libération. Il y est qualifié de « plus macronien que Macron ».

La Voix du Nord s’interroge : « pourquoi un responsable politique ne participerait- il pas aux débats d’idées qui, chaque jour, se tiennent dans les médias ? Pourquoi un journaliste devenu polémiste n’aspirerait-il pas à entrer au service de l'action publique ? Les uns et les autres présentent un même goût pour la chose politique. Mais, pointe le quotidien nordiste, ce mélange des genres jette la suspicion. »

Une « confusion des genres, renchérit La Charente Libre, qui nourrit un peu plus la défiance raillée par Coluche envers ces 'milieux autorisés qui s’autorisent à penser' à la place des lecteurs et des électeurs. »

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