Hasballah Jassey travaille dans un magasin de matériel informatique. D’habitude, dans la boutique, on entend le bruit de la photocopieuse ou de l’imprimante. Mais aujourd’hui, rien. La faute à une nouvelle coupure de courant.
« Des fois on reste assis une journée entière, sans électricité et donc sans travail. Une fois, ça a même cassé l’une de nos grosses imprimantes. C’est sûr, on perd beaucoup d’argent à chaque fois qu’il y a des coupures d’électricité. »
NAWEC doit fournir de l’électricité à 2 millions d’habitants avec des générateurs vieux de quarante ans, dont la moitié est actuellement en panne. Ces problèmes d’équipement révèlent la situation économique catastrophique de la compagnie d’Etat.
C’est résultat, selon son directeur adjoint, Nani Juwara, de la gestion sous l’ancien gouvernement de Yahya Jammeh : « La plupart des décisions qui ont été prises ont été imposées par des directives de l’exécutif. Et ce sont les conséquences de ces directives que subissent aujourd’hui NAWEC et d’autres institutions publiques. Par exemple, à l’époque, le gouvernement n’acceptait pas la compétition en matière de fourniture de carburant. On ne pouvait acheter qu’à partir d’une source, la sienne. Donc s’il voulait, il pouvait augmenter le prix autant qu’il le voulait. »
Pire encore, de nombreuses entreprises étaient dispensées de payer leurs factures ! « Certaines institutions, en lien avec le gouvernement, ne payaient pas leur électricité chaque mois. Et s’ils ne payent pas, NAWEC est obligé d’emprunter de l’argent à la banque, avec un taux d’intérêt. L’ancien président était au courant de cette situation. Mais il n’y a pas répondu efficacement. Donc, sur le papier, nous sommes en faillite. »
Le ministère de l’Economie estime la dette totale de la compagnie à 172 millions d’euros, 9 milliards de dalasis, la monnaie locale. Alors pour en éponger une partie, l’AMRC, la compagnie qui s’occupe du recouvrement pour l’Etat, a été chargée de collecter les remboursements.
Son directeur général, Saikou Kujabi, a déjà recensé toutes les entreprises concernées : « On a décidé d’abord de les inviter à une rencontre, puis nous agirons. Mais ils ont la volonté de payer, car ils connaissent les pouvoirs de l’AMRC. Et même si notre mission est de les faire payer, on ne veut pas tuer ces entreprises. On va monter avec eux des plans de paiement, qui seront gagnant-gagnant, car la plupart de ces entreprises emploient des centaines de Gambiens. »
En attendant de se remettre sur pieds, la compagnie gambienne va faire appel à sa voisine sénégalaise et envisage d’autoriser des investisseurs privés à produire de l’électricité.