Cinq millions d’euros, c’est l’estimation du manque à gagner publicitaire que va occasionner la sanction du CSA après deux dérapages de l’animateur Cyril Hanouna sur la chaîne C8 du groupe Canal+, de Vincent Bolloré.
Le premier dérapage remontre à novembre quand Hanouna a fait croire à l’un de ses chroniqueurs qu’il était l’auteur d’un meurtre, n’hésitant pas à le laisser dans un état de détresse jusqu’au lendemain. Cette mise en scène morbide vaut à C8 une semaine d’interdiction de toute publicité avec l’émission. La deuxième séquence remonte à décembre quand l’animateur a demandé à l’une de ses chroniqueuses de deviner en fermant les yeux quelle partie du corps il lui faisait toucher, avant de porter sa main vers son sexe. La sanction est encore plus lourde. Deux semaines de privation de publicité pour cette scène jugée sexiste et dégradante pour la femme.
Dans les deux cas, l’instance de régulation est allée beaucoup plus loin que ce que préconisait le rapporteur indépendant qui ne réclamait qu’une amende de 50 000 euros pour la séquence sexiste. Alors pourquoi le CSA a-t-il eu la main si lourde, comme le fustige l’animateur en regrettant que les 5 millions d’euros perdus n’aillent pas dans les caisses d’associations ? Eh bien sans doute compte tenu de l’effet cumulatif des dérapages – huit en cinq ans selon Hanouna – et surtout dans un contexte bien particulier puisque 40 000 plaintes sont arrivées au CSA depuis la fin mai pour protester contre une autre séquence perçue comme homophobe où l’animateur caricaturait en direct un bisexuel répondant après une annonce sur un site de rencontres.
Cette séquence était-elle homophobe ? L’animateur plaide que non. Il s’est excusé et le dossier sera instruit dans le cadre d’une procédure qui devrait aboutir en juillet. Mais après tout, l’important est sans doute qu’elle ait été ressentie comme homophobe par beaucoup de gays qui y ont vu rires et moqueries à leurs dépens. Et ce qui a fait bouger les choses, c’est la mobilisation de nombreux internautes sur les réseaux sociaux qui ont interpelé les marques pour leur demander si elles s’associaient à ce programme. C’est alors qu’Hanouna a été pris à son propre piège qui consiste à lâcher une provocation pour faire le buzz donc de l’audience, quitte à s’excuser ensuite. Les annonceurs ont déserté son émission comme il l’avait fait aux Etats-Unis avec l’animateur Bill O Reilly, jusqu’à ce qu’il soit licencié alors qu’il était accusé de harcèlement sexuel. Cyril Hanouna, lui, est indéboulonnable depuis qu’il a signé un accord de 250 millions sur cinq ans avec Vincent Bolloré.