L’arrestation des deux journalistes français de l’agence Capa, le 11 avril, à Caracas, a finalement trouvé une issue heureuse avec leur retour en France vendredi, alors que Jean-Luc Mélenchon avait appelé à les « relâcher », fort de son soutien passé à Hugo Chavez. Mais cette libération ne doit pas faire oublier la crise sociale et de régime que traverse le pays ainsi que les nombreuses atteintes à la liberté de l’information qui s’y expriment. Reporters sans frontières rappelle ainsi que les journalistes étrangers sont régulièrement expulsés et que la censure s’exerce aussi vis-à-vis de la presse internationale. Le 6 février, la diffusion sur CNN d’une enquête sur un trafic de passeports entre le Venezuela et des ressortissants irakiens, impliquant le vice-président vénézuélien, a amené l’organe de régulation à suspendre une semaine plus tard le signal de la chaîne et à mettre fin à la diffusion de CNN dans le pays.
Cette affaire montre bien à quel point le contrôle de l’audiovisuel est sensible au Venezuela. Derrière ces médias de masse, le gouvernement espère modérer la colère du peuple, touché de plein fouet par la suppression des aides sociales et les pénuries liées à l’effondrement des prix du pétrole. Le chef de l’Etat, Nicolas Maduro a hérité de Chavez les cadenas, ces longs monologues retransmis sur les chaînes nationales. La chaîne d’opposition Globovision a été rachetée par des mains plus conciliantes avec son directeur frère de ministre. Il n’y a plus que sur la télé câblée que certaines chaînes peuvent résister à la « guerre médiatique » théorisée depuis 2002 par Hugo Chavez, après le putsch manqué dont il avait rendu responsables les médias privés.
L’opposition, qui a conquis la majorité parlementaire fin 2015, peut encore s’appuyer sur des journaux comme El Nacional. Mais la pression est constante et le journal fait face, comme beaucoup, à des pénuries de papier. En août dernier, des hommes masqués ont attaqués la façade du journal au cocktail Molotov. Ce même été, des inconnus avaient ouvert le feu sur le Diairio de los Andes, lancé une grenade contre un quotidien de Maracay et le directeur du journal El Correo de Caroni, David Natera Febres, a été condamné à quatre ans de prison pour avoir couvert des faits de corruption. Depuis sept ans, une loi prévoit la prise de contrôle de tout contenu susceptible de remettre en cause l’autorité légitime. Même s’il existe donc des voix d’opposition, l’autocensure menace et les vénézuéliens préfèrent se tourner vers les réseaux sociaux ou circulent de fausses informations qui attisent la haine et la colère.