Les expatriés pris en otage par la négociation du Brexit ?

Theresa May, la Première ministre britannique, déclenchera mercredi le processus de sortie de l'Union européenne. Alors que ni Londres ni Bruxelles n'ont encore dévoilé leurs agendas respectifs, l'inquiétude grandit dans la communauté des expatriés.

Officiellement, trois millions de citoyens européens sont installés au Royaume-Uni et un million de Britanniques dans l’Union européenne. Les chiffres réels sont sans doute beaucoup plus élevés, car tous ne sont pas répertoriés dans les consulats.

Pour les uns comme pour les autres, la procédure du divorce est hyper-anxiogène, car ils ne savent absolument pas ce que les négociateurs leur réservent. Pire encore, ils ont aujourd’hui le sentiment d’être pris en otage par les négociateurs. Londres et Bruxelles, c’est de bonne guerre, ayant refusé pour l’instant toute concession sur ce dossier ultra-sensible, des deux côtés de la Manche. 

Quelles sont les préoccupations concrètes des Européens résidant au Royaume-Uni ?

Les plus stressés sont ceux qui partagent la vie d’un ressortissant britannique. Vont-ils pouvoir sur place rester ensemble ou, s’ils doivent partir, le conjoint aura-t-il la possibilité de résider dans un autre pays de l’Union européenne ? L’autre question récurrente, quelle que soit la situation familiale, c’est celle de l’emploi. Ils redoutent de le perdre surtout à cause d’éventuelles relocalisations dans l’Union européenne. Enfin troisième sujet d’angoisse : la baisse du pouvoir d’achat.

Avec la chute de la livre et l’inflation induite, ils redoutent de voir leur revenu réel s’éroder. Les 800 000 Polonais installés au Royaume-Uni seront les premiers à lever le camp si les promesses radieuses de l’expatriation ne sont plus tenues. Le Brexit va-t-il se doubler d’un exode massif ? C’est aussi un sujet de préoccupation pour des pans entiers de l’économie britannique très dépendante de cette main d’œuvre.

Du côté des Britanniques vivant dans l’Union européenne, c’est en Espagne que les expatriés sont les plus mobilisés

Car c’est en Espagne qu’ils sont les plus nombreux. 300 000 sujets de la couronne sont inscrits dans les consulats. Mais en fait, ils seraient plutôt un million, si on prend en compte ceux qui passent seulement une partie de l’année sous le soleil ibérique. Là encore, les finances sont le principal objet de tracas. Les ressortissants britanniques vont-ils toujours bénéficier de la sécurité sociale espagnole ? Ceux qui sont à la retraite continueront-ils à toucher leur pension britannique ?

Les actifs réfléchissent sérieusement à demander la nationalité espagnole, car Madrid ne reconnaît pas encore aux Britanniques la possibilité de cumuler les deux passeports. Depuis le référendum, les dossiers de candidature ont été multipliés par six, même s’ils restent anecdotiques, avec environ 500 demandes depuis le 26 juin 2016.

Theresa May demande depuis le début le respect réciproque des droits des expatriés

Bruxelles a refusé de lui signer ce chèque en blanc avant l’ouverture officielle des négociations. La libre circulation des personnes fait partie des piliers du marché intérieur. Si Theresa May le refuse afin de conserver le contrôle l’immigration, pourquoi faire une exception pour les expatriés déjà installés ?

Bruxelles a donc fermement repoussé le règlement rapide des droits des ressortissants européens formulés par un groupe de députés conservateurs. D’après des observateurs, le sort des expatriés pourrait bien être le serpent de mer de cette négociation historique qui commencera une fois que Theresa May aura déclenché l’article 50. 

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