« Malgré sa défaite à la présidentielle du 1er décembre dernier, Yahya Jammeh se démène pour trouver un semblant de légitimité constitutionnelle à sa lutte pour s’accrocher au pouvoir », constate Enquête. En effet, dernier coup d’éclat, poursuit le quotidien sénégalais : « le leader gambien a nommé cinq magistrats nigérians et un Sierra Léonais pour siéger à la Cour suprême de son pays. En Gambie, on ne se fait pas d’illusion sur le fait que cette désignation en catimini est destinée à invalider la victoire d’Adama Barrow. Surtout qu’aucun des magistrats choisis par Jammeh pour annuler la victoire du président élu n’a la nationalité gambienne. […] Aux dernières nouvelles, précise encore Enquête, les hommes de main de Yahya Jammeh s’affairaient à prendre des dispositions pour que les six juges contractés arrivent à Banjul dès demain. Ils devraient rentrer chez eux le 20 janvier, après avoir invalidé la victoire d’Adama Barrow. Mais nos sources soulignent que jusqu’à hier, certains juges n’avaient pas encore confirmé leur arrivée à Banjul. »
Ce qui est sûr, c’est que le président de la commission électorale, Alieu Momarr Njie [(Ndiaye)] a fui le pays… « Qu’est-ce qui a bien pu pousser le vieil homme de 82 ans, qui disait qu’à son âge rien ne pouvait lui faire peur, à larguer les amarres ?, s’interroge L’Observateur Paalga au Burkina. Sans doute la pression de plus en plus étouffante du pouvoir de Yahya Jammeh, répond le journal, et celle, bienveillante, de sa famille qui l’aura convaincu de décamper avant que le pire n’advienne. La situation du président de la commission électorale était en fait symptomatique de la chape de plomb qui pèse sur ce petit pays. […] La fuite du vieux intervient à seulement deux semaines de la fin constitutionnelle du mandat du président sortant, le 18 janvier, et de l’hypothétique investiture du chef d’Etat élu Adama Barrow et à une semaine du verdict de la cour suprême, qu’en désespoir de cause Yahya Jammeh a saisie après avoir contesté les résultats pour demander ensuite leur annulation pure et simple. Quand on sait que cette juridiction qui végétait a été ressuscitée à la faveur de la crise, on n’a pas besoin d’être un devin, soupire L’Observateur Paalga, pour savoir de quel côté va se pencher la balance. »
Finalement, pointe pour sa part le site d’information guinéen Ledjely.com, « en Gambie, jour après jour, on s’achemine vers la confrontation, de plus en plus perçue comme l’unique solution réaliste. Parce que Yahya Jammeh ne laisse la place à aucune autre alternative. Plongeant le pays dans un climat de terreur et faisant planer l’épée d’une mort certaine sur la tête de tous les esprits indépendants, il entend conditionner la Gambie et les Gambiens à accepter sa volte-face et le fait qu’il sera leur président au-delà du 19 janvier. D’où la pression qu’il exerce sur les médias et les menaces qu’il fait planer sur les institutions et leurs membres. Menaces dont l’illustration la plus parfaite demeure la fuite du président de la Commission électorale, Alieu Momarr Njie. En face d’un homme aussi désespéré que l’est aujourd’hui Yahya Jammeh, il est vain d’envisager le dialogue comme option. »
Et Ledejly.com de lancer cet appel : « faut-il céder à ce chantage ? Ne se rendrait-on pas alors coupable de complicité à l’égard des crimes et autres violations des droits humains commis par Jammeh ? Ne priverions-nous pas les Gambiens de l’aide et du soutien dont ils ont besoin pour se débarrasser d’un président psychopathe qui les soumet depuis 22 longues années ? Pour des Africains qui nous plaignons trop souvent de l’interventionnisme occidental, n’est-ce pas l’occasion de prouver que nous sommes en mesure de gérer nos propres crises ? La Cédéao est donc face à ses responsabilités ! »
Enfin, notre correspondant en langue haussa à Maroua, au Cameroun, Ahmed Abba, est toujours en prison… Son procès a été de nouveau renvoyé par la justice camerounaise. RFI a fait part hier de sa stupéfaction et de sa colère. De même que, ce matin, certains médias du continent, dont le quotidien Aujourd’hui à Ouaga. « De désistement de supposés témoins à l’absence de preuves et moult renvois, la preuve est faite que le dossier est vide. Et c’est le non-lieu qui s’impose, s’exclame Aujourd’hui. Jugez donc, Abba sur des preuves, c’est-à-dire sur ses supposés atomes crochus avec Boko Haram, sinon, laissez-le exercer librement sa profession qu’il n’a fait qu’accomplir et qui lui coûte 18 mois de privation de liberté. »