A la Une: le Front national entre affaires et divisions

Il était quelque peu éclipsé dans l’actualité française, par la primaire à droite et par les bisbilles à gauche. Mais le Front national revient sur le devant de la scène médiatique. Non pas pour son programme et ses idées, dans cette période pré-campagne électorale ; il s’agit tout d’abord de ses « casseroles », pour reprendre l’expression du Parisien ce matin.

En effet, pointe le journal, « surfacturations. Fausses factures. Emplois fictifs. Escroqueries. Comme d’autres partis avant lui, le Front national doit désormais se familiariser avec le vocabulaire du soupçon et des prétoires. Le financement de toutes les campagnes électorales du parti depuis 2012, soit depuis l’accession de Marine Le Pen à sa présidence, est entre les mains de la justice »,relève Le Parisien.

« La première enquête, celle des comptes de la présidentielle et des législatives de 2012, est bouclée. Et, même si sa chef n’est pas poursuivie, le parti en tant que tel est mis en cause. Des magistrats du pôle financier - les mêmes qui enquêtent par exemple sur le scandale Bygmalion ou l’arbitrage controversé de l’affaire Tapie - plongés dans les comptes du parti d’extrême droite, voilà qui fait mauvais genre pour une formation qui se targue d’être exemplaire. »

« Sans parler, rajoute Le Parisien, de l’enquête préliminaire ouverte sur le patrimoine de Jean-Marie Le Pen, mais aussi, à la marge, de sa fille, par le parquet national financier, après des soupçons de sous-évaluation de patrimoine ! » Commentaire du journal : « Si elle est prouvée, la recette de cette mauvaise tambouille - escroquerie au préjudice de l’Etat, abus de biens sociaux, enrichissement personnel… - pourrait rester en travers de la gorge d’un grand nombre d’électeurs. »

Maréchal vs Philippot

Autre fil à la patte du FN, le fossé de plus en plus profond entre deux figures du parti : Marion Maréchal-Le Pen et Florian Philippot. « À ceci aussi se reconnaît la normalisation du Front national, note Le Figaro : les querelles de lignes et les batailles de personnes s’y déploient au grand jour. L’animosité entre Marion Maréchal-Le Pen et Florian Philippot, sous le regard agacé de Marine Le Pen, n’est pas sans rappeler les haines entre Lionel Jospin et Laurent Fabius, à l’ombre de François Mitterrand, ou entre Alain Juppé et Philippe Séguin sous Jacques Chirac. »

« Entre la benjamine de l’Assemblée et le député européen, la crise couvait depuis longtemps », ajoute Le Figaro. Qu’est-ce qui les oppose ? Eh bien, répond le quotidien français, deux lignes stratégiques opposées. Pour Marion Maréchal-Le Pen, « face à François Fillon, se contenter de jouer la défense des services publics et dénoncer l’ultralibéralisme ne suffira pas à convertir au lepénisme les orphelins de la gauche. À l’inverse, son rival Florian Philippot est persuadé qu’il n’y a guère d’électeurs à gagner en se plaçant sur le terrain des valeurs familiales ou de la défense de la vie. »

« On s’en doutait déjà. Marion Maréchal-Le Pen et Florian Philippot ne passeront pas Noël ensemble, ironise Le Midi Libre. Les deux cadres du Front national, qui se détestent copieusement, viennent encore une fois de mettre leur différend sur la place publique au sujet du remboursement de l’IVG. Une passe d’armes haineuse qui en dit long sur la guerre de pouvoir que se livrent ces figures de l’extrême droite dans le dos de leur présidente. »

« Même si Marine Le Pen minimise à nouveau l’incident, on est frappé par la brutalité de l’échange. Par la violence des coups », remarque le quotidien régional. « Si le conflit perdure, pointe encore Le Midi Libre, Marine Le Pen devra donc faire un second choix douloureux. Après avoir mis son père au placard, osera-t-elle s’en prendre à sa nièce, icône de l’aile dure du parti ? Ou bien préférera-t-elle se débarrasser de son principal lieutenant, tête pensante du mouvement ? »

Insécurité sociale…

A la une également, le rétropédalage de François Fillon sur la réforme de l’assurance-maladie. « Halte au feu !, s’exclament Les Echos. L’incendie déclenché par les propos de François Fillon lors du dernier débat de la primaire à droite sur les remboursements de soins n’en finissait pas de s’étendre. Ses proches s’escrimaient à l’éteindre, en pilonnant les " caricatures " et en promettant des " clarifications ". Sans succès. Le candidat s’est résolu à intervenir dans une tribune publiée hier soir sur Lefigaro.fr, jurant que l’assurance-maladie " continuera de couvrir les soins comme aujourd’hui ". »

Cette mise au point était nécessaire, estime le quotidien économique : « Le diagnostic de François Fillon est juste, son remède ne l’est pas, et c’est pour cette seule raison qu’il a bien fait de rectifier sa prescription. Distinguer le petit risque du gros risque n’était pas odieux, c’était une idée dépassée, estiment Les Echos (…). En pratique, aucun médecin ne sait faire la différence entre la bonne et la mauvaise bronchite… Surtout, ce n’est plus là que sont les gros gisements d’économies d’un système de santé, dont les deux tiers des dépenses sont dus aux affections lourdes et de longue durée. »

Et Les Echos de s’interroger : « Comment dégager les ressources pour financer des pathologies toujours plus onéreuses ? En intensifiant l’évaluation des médicaments, des techniques et des dispositifs pour ne rembourser que ce qui rend un véritable service médical. En accélérant la réorganisation du système de soins, en cassant les murs entre public et privé. La Sécurité sociale a profité depuis quinze ans de réformes plutôt efficaces car pragmatiques. Il serait bon qu’elle ne redevienne pas l’otage de la politique. L’idéologie est une mauvaise médecine. »

Libération se félicite également de ce recul de François Fillon. « Sécurité sociale : Fillon perd son assurance », titre Libération. « Un premier adoucissement dans son projet de ' rupture radicale ' ?, s’interroge le journal. Le candidat protestera qu’il n’est pas question de dévier de sa ligne. Sans doute parlera-t-il, comme le font ses lieutenants, " d’approfondissement " ou " d’enrichissement " de son projet. Mais c’est bien d’un abandon dont il s’agit. (…) La distinction entre maladies graves et affections bénignes, inscrite dans son projet et vivement critiquée, est donc abandonnée. »

Ronaldo, roi des euros…

Enfin, Cristiano Ronaldo a reçu hier son quatrième ballon d’or. La récompense décernée par France Football consacrant le meilleur joueur de l’année. Et Libération de s’interroger : où est la morale ? « Karim Benzema avait été écarté de la liste des 30 présélectionnés par la rédaction de l’hebdo sur des critères éthiques, rapport à son implication présumée dans l’affaire du chantage à la sextape dont a été victime Mathieu Valbuena. » Alors, « voir le trophée remis à une superstar portugaise ayant, selon les révélations des Football Leaks, bénéficié d’une optimisation fiscale sur ses droits d’image portant sur 150 millions d’euros, a de quoi faire sourire. »

Partager :