Pour les députés wallons, le CETA risque de mettre à mal plusieurs secteurs, l’agriculture en premier lieu. Le gouvernement wallon réclame de vraies mesures pour protéger les agriculteurs, et l’inscription d’une « exception agricole » dans le traité. Pour bon nombre d’agriculteurs européens, les exportations canadiennes, même si elles ne sont pas importantes en volume, peuvent tout à fait déstabiliser une filière déjà fragile.
Autre sujet de discorde : l’instauration, avec ce traité, de tribunaux d’arbitrage amenés à régler les différends entre les entreprises, et les États. « Nous ne voulons pas, explique le chef du gouvernement wallon, d’arbitrages privés dans lesquels les multinationales pourraient attaquer les États et remettre en cause les normes sociales, environnementales, la protection des services publics ». Le gouvernement demandait donc une renégociation ou, du moins, une « déclaration interprétative », une explication de texte du traité dotée de garanties juridiques, article par article.
Un échec entamerait la crédibilité de l’Union comme partenaire commercial
Chrystia Freeland, la ministre canadienne du Commerce international a été très claire la semaine dernière : « Il semble évident pour moi, pour le Canada, que l'Union européenne n'est pas capable maintenant d'avoir un accord international, même avec un pays qui a des valeurs aussi européennes que le Canada », a-t-elle dit. Une phrase qui sème évidemment le doute. S’il est difficile de trouver un accord avec le Canada, alors qu’en sera-t-il pour le TAFTA, le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement avec les États-Unis ? Le TAFTA qui n’est autre que le grand frère du CETA !
En cas d’échec, les Américains auront-ils envie de poursuivre les négociations avec une Union européenne qui dirait non au Canada ? D’autant que la France n’en veut pas. Sans oublier les autres accords toujours en négociation : Bruxelles discute depuis trois ans avec le Japon, pour un accord de libre-échange similaire à celui du CETA.
L’Union européenne comptait aussi sur la ratification l’an prochain de l’accord entre l’Union européenne et le Vietnam. Quel avenir pour les autres traités ? L’Union européenne sera-t-elle condamnée à se replier sur elle-même, ou devra-t-elle se résoudre à ne plus négocier en tant qu’entité, mais à laisser chacun de ses Etats membres faire comme bon lui semble. Une forme de renationalisation en somme.
Bataille de communication
Alors que le sommet de jeudi semblait enterré en début d’après-midi lundi 24 octobre, rebondissement : Donald Tusk, le président du Conseil assure, lui, qu’un accord est encore possible et décide de maintenir le sommet avec Justin Trudeau, le Premier ministre canadien.
Méthode Coué, ou conviction réelle que le CETA peut être sauvé ? En tout cas, ce que l’on retiendra, c’est que le Conseil européen aura fait son possible pour que le traité soit signé, et si échec il y a : qu’il est de la seule responsabilité des francophones de Belgique et non pas de l’Union européenne.
Ce manque d’unité n’augure, en tout cas, rien de bon concernant les négociations de Bruxelles et Londres pour la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union. Si les pays membres n’arrivent pas à afficher une certaine unité, qu’en sera-t-il lors de la négociation des 163 traités commerciaux qui lient l’Union européenne à la Grande-Bretagne ?