RFI : Smaïl Chergui, vous avez dit lors de votre discours que cet accord représentait un espoir et en même temps vous dites qu’il n’est pas parfait.
Smaïl Chergui : Il représente un espoir dans la mesure où il clarifie un certain nombre de points qui nous paraissent vitaux, à la fois le fait que les Congolais se sont entendus sur le scrutin, donc on aura les élections présidentielles et parlementaires dans l’ordre souhaité par tout le monde. Je pense que ça c’est un acquis.
En deuxième lieu, nous avons maintenant une date pour ces élections, c’est-à-dire normalement le 29 avril, ce qui donne une certaine visibilité au processus. D’une certaine manière c’est une avancée réelle sur laquelle nous souhaitons construire, faire en sorte que cette transition puisse réellement se dérouler dans la paix et la sérénité et réellement préparer ces élections qui doivent être transparentes et crédibles.
Evidemment, ce n’est pas un accord parfait parce que dans l’absolu il n’y a jamais d’accord parfait. Moi, j’aurais souhaité que toute l’opposition avec la majorité aient participé dans ce dialogue et soient sorties avec un accord qui ira au-delà du consensus, même à l’unanimité. Mais compte tenu vraiment des défis immenses de la RDC, je crois que c’était le meilleur accord possible dans cette phase.
Vous parliez du 29 avril 2018. La date n’est pas fixée réellement dans l’accord. On parle de six mois après la convocation des scrutins. Est-ce que pour vous c’est une date butoir sur laquelle on ne pourra pas revenir ?
Evidemment, ce n’est pas à nous de prendre cette décision. Mais nous prenons aujourd’hui note et acte de ce que ce dialogue nous donne une date qui est là, sur laquelle nous devons tous travailler pour aider la RDC à réaliser ce scrutin. Et… sauf vraiment catastrophe exceptionnelle, naturelle ou autre, nous souhaitons que ces dates soient réellement maintenues.
Quand l’Union africaine insiste sur le respect de la Constitution en RDC, comme c’est d’ailleurs stipulé dans l’accord, qu’est-ce qui pour vous est important ?
Je pense que ce qui est attendu par tous c’est que la disposition de la Constitution relative au nombre de mandats soit également respectée. Je crois que c’est l’élément clé que tous les Congolais et nous-mêmes et toute la communauté internationale doivent lire à travers cette disposition.
Certains parlent de l’ouverture d’un deuxième dialogue. Pour vous ce ne serait pas nécessaire ?
Oui, à ce stade, évidemment il y a un comité de suivi qui est national, mais l’Union africaine dans les prochains jours aura à se prononcer au niveau du conseil Paix et Sécurité sur cet accord, le consacrer ; je ne vois pas ce que pourrait apporter un autre dialogue qui serait lancé maintenant. Il faudra d’abord suivre la mise en œuvre de l’accord et si vraiment nous aurons des pierres d’achoppement ou de nouveaux problèmes qui paraissent insurmontables, à ce moment-là l’Union africaine verra – en association avec les Nations unies, l’Union européenne, la Francophonie, la CRGL, la SADC, la CEEAC – nous verrons comment apporter notre concours s’il était nécessaire.
Il y a une source d’inquiétude aujourd’hui en République démocratique du Congo, c’est notamment la présence de ces combattants, de ces ex-rebelles sud-soudanais, qui inquiète notamment la population du nord Kivu qui demande le départ de ces rebelles. Est-ce qu’aujourd’hui l’Union africaine est en mesure de pouvoir retirer ce groupe armé de la RDC ?
C’est une question dont est en charge en premier lieu les Nations unies, qui ont eu à accueillir ces éléments dans un piteux état. Ils ont fait le devoir humanitaire. Mais par ailleurs nous comprenons parfaitement les inquiétudes de la RDC, compte tenu du nombre de groupes armés qui sont dans ce pays et qui compliquent la vie, et non seulement de la RDC, mais toute la région.
La semaine dernière j’ai été à Juba et moi-même j’ai évoqué la question. Il y a une possibilité : si ces éléments expriment volontairement le souhait de retourner chez eux, les autorités m’ont assuré qu’ils pourraient les recevoir et les mettre dans le DDR. Une fois que nous aurions confirmé cette volonté, librement exprimée, à ce moment-là nous travaillerons sur l’amnistie pour ces personnes. Mais évidemment, au moment où nous en parlons nous n’avons pas encore de solution, parce qu’aucun pays ne peut accepter des réfugiés qui aient été des combattants armés par le passé.