L'objet de ce fonds, c'est investir dans les PME, c'est-à-dire dans les entreprises africaines qui ont aujourd'hui le plus grand mal à trouver des capitaux frais. Les banques rechignent à prendre des risques, les bourses ne sont pas encore assez développées, et les grands fonds anglo-saxons les dédaignent. La mise est trop petite pour eux, pas assez juteuse. Les initiateurs de ce fonds de la diaspora sont eux convaincus qu'il y a un créneau rentable pour l'investisseur et utile pour le développement de leur continent.
« Les petits ruisseaux font les grands fleuves » selon Jean-Luc Vovor, de Kusuntu Partners, sollicité pour les accompagner. Les membres fondateurs appartiennent au club Efficience qui fédère l'élite africaine présente en France, et c'est donc naturellement le nom du club qui a été retenu pour baptiser ce tout nouveau fonds de capital investissement voué à l'Afrique. Il y a plus de 200 fonds de private equity destiné à l’Afrique à travers le monde, mais les Français se comptent toujours sur les doigts d'une seule main.
Pourquoi la France dont la présence économique en Afrique est ancienne s'est-elle si peu impliquée dans cette industrie ?
Les principaux investisseurs, comme les assureurs, sont soumis à des contraintes prudentielles qui leur ôtent tout appétit pour ce type de produit. Par ailleurs, il n'y a pas en France des fonds de pension ou des gérants de grande fortune comme aux Pays-Bas, en Finlande, en Suisse ou en Norvège. Des pays où des fonds entièrement dédiés à l'Afrique ont été lancés il y a longtemps, alors que leur économie est peu reliée au continent. Les rares fonds étiquetés français, comme Améthis Finance créé avec le groupe Rothschild, ou Investisseurs et Partenaires, sont français surtout par la nationalité de leurs équipes réputées. Elles ont été formées avec des anciens de Proparco, le bras financier de l'aide française au développement.
Dans ce climat peu favorable au capital investissement, une exception française a donné des idées à la diaspora africaine
C'est l'existence des FCPI, ou Fonds commun de placement dans l'innovation, un véhicule financier permettant aux particuliers de répondre à l'appel d'un fonds d'investissement. C'est unique au monde. Partout ailleurs cette activité est réservée à des investisseurs professionnels. Pour conforter sa légitimité, ce fonds de la diaspora en cours de finalisation s'appuie sur des acteurs déjà bien rôdés : Investisseurs et Partenaires spécialisé dans les petites entreprises. La structure fondée par Jean-Michel Severino, un ancien patron de l'Agence française du développement, mettra à disposition ces experts chevronnés installés sur le continent ; ils vont repérer et accompagner les entreprises ciblées.
Est-ce vraiment le bon moment de placer ces économies en Afrique alors que la croissance ralentit ?
Il peut y avoir des revers. Améthis Finance a par exemple une participation dans une banque kenyane, la Chase Bank, aujourd'hui en difficulté. Cette activité n'est pas sans risque, mais le fonds est tenu d'honorer le rendement promis. Certains analystes s'inquiètent de la surchauffe engendrée par des taux de rentabilité défiant toute concurrence, deux fois plus élevés qu'en Europe. L'année dernière le montant des fonds levés a chuté, cette décélération devrait continuer. D'autres voient le verre plutôt à moitié plein et considèrent que les fonds sont désormais plus avisés et peut-être plus actifs en privilégiant des participations majoritaires.