Le traité de libre-échange avec le Canada à l’épreuve de la démondialisation

Les ministres européens du Commerce se retrouvent à partir de ce jeudi après-midi à Bratislava pour discuter du sort du CETA. Le traité de libre-échange avec le Canada doit être ratifié cet automne mais il suscite de nombreuses critiques.

On se demande si le CETA ne va pas être enterré comme l’a été le traité transatlantique avec les Etats-Unis en cours de négociation. Sous la pression croissante de la population de plus en plus hostile à la mondialisation n’est-on pas en train de basculer dans la démondialisation ? Dans les échanges c'est déjà une réalité. Le reflux a commencé avec la crise de 2008. On a cru d'abord à un accident de parcours. Mais les chiffres sont têtus : avant la crise le commerce mondial progressait beaucoup plus vite que la croissance, il en a été l'un des moteurs, cette tendance s'est maintenant inversée. Cette année le volume des échanges de marchandises est inférieur à celui de 2014.

L'OCDE, le club des pays dits avancés s'en alarme.

La croissance est anémique et on ne peut pas compter sur le commerce pour la doper puisqu'il continue à évoluer moins vite que l'activité économique constate l'agence. Chaque année depuis 2012 l'organisation mondiale du commerce annonce de son côté le rebond des échanges. Mais il n'a toujours pas eu lieu. Le grand cycle de mondialisation entamé au vingtième siècle semble être arrivé en bout de courses concluent de nombreux économistes.

Le ralentissement de l'économie provoque ce repli ?

La croissance molle que connait l'Europe explique en partie cet essoufflement. Car le tiers des échanges sont le fait du continent européen. Mais si la mondialisation marque le pas c'est surtout parce que ceux qui en ont le plus bénéficié n'ont plus grand chose à en tirer. Ils sont donc en train de passer à autre chose.

La Chine revendique depuis 2014 le titre de première puissance commerciale mondiale, mais elle n'a plus la vocation à fabriquer exclusivement pour les autres. Elle veut maintenant satisfaire sa demande intérieure. Les autres grands gagnants de la mondialisation, les multinationales de l'hémisphère nord, ne voient plus aujourd'hui l'intérêt de délocaliser à outrance car avec la hausse des salaires n'est plus le meilleur moyen de maximiser leurs profits.

Comment expliquer la défiance croissante à l'égard de la mondialisation au moment où son déclin est en marche ?

La mondialisation a eu des effets positifs sur le pouvoir d'achat dans les pays émergents comme en occident. Mais elle a aussi laissé des perdants sur le bord de la route. Le reflux des échanges ne leur a pas rendu un travail ou leur niveau de vie d'antan. Echaudés, ils rejettent en masse tout ce qui est perçu comme le prolongement de la mondialisation, c'est-à-dire les traités de libre échange comme le traité transatlantique aujourd’hui enterré, ou le CETA, le traité que l'Europe aimerait ratifier cet automne avec le Canada.

La mobilisation contre ce dernier est particulièrement forte en Allemagne, dans la Belgique wallonne et en Autriche. Dans ce pays, les altermondialistes ont été rejoints par des patrons locaux de la grande distribution ou de l'industrie. En France, des entrepreneurs qui redoutent d'être écrasés par cet accord ont aussi fait part de leur opposition. Car ce qui fait débat aujourd'hui, y compris dans les milieux d'affaires, c'est le partage équitable des retombées économiques qu’apporte la mondialisation et qu'un tel traité peut ou non générer.

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