« La tension est montée d’un cran hier mardi dans la capitale congolaise, constate le site d’information Afrikarabia, après la sanglante répression de lundi. Au second jour des émeutes, une étrange atmosphère régnait dans cette immense mégalopole de 10 millions d’habitants. Le centre-ville était anormalement désert alors que de violents incidents éclataient autour des permanences des partis politiques d’opposition et dans certains quartiers populaires, où la garde présidentielle traquait opposants et manifestants. Après la mise à sac du PPRD, le parti présidentiel, avant-hier, ce sont les sièges des partis d’opposition qui ont été visés hier, pointe encore Afrikarabia. En quelques heures, au moins sept partis politiques ont vu leurs sièges attaqués par des hommes armés, et incendiés, à commencer par celui de l’UDPS, le parti de l’opposant historique Etienne Tshisekedi. Deux corps carbonisés ont été retrouvés dans les décombres et cinq personnes ont été blessées. (…) Gouvernement et opposition s’accusent mutuellement des exactions et des pillages de ces deux premiers jours d’émeutes. »
L’Eglise catholique prend ses distances
Fait important hier, relève pour sa part le site d’information congolais Actualité 7sur7 CD : la CENCO, la Conférence épiscopale nationale du Congo, institution catholique très écoutée, a largement pris ses distances avec le pouvoir en place. La CENCO demande une enquête indépendante pour établir les responsabilités sur les tueries d’hier et d’avant-hier. Qui plus est, elle suspend sa participation au dialogue national voulu par le président Joseph Kabila. Le collège des évêques exige qu’il soit « clairement établi et stipulé » dans l’accord politique devant être forgé à l’issue de ce forum, « que l’actuel Président de la République ne sera pas candidat à la prochaine élection présidentielle à organiser le plus tôt possible ».
Pour L’Observateur Paalga au Burkina, le message est clair : « les évêques auraient voulu indiquer à Kabila la porte de sortie qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement. » Et le quotidien ouagalais de s’interroger : « la brebis égarée du Palais de la nation entendra-t-elle le sermon de l’épiscopat de son pays, ou va-t-elle s’entêter, comme c’est souvent le cas de ces chefs d’Etat, sûrs de leur pouvoir, qui font la sourde oreille face à tous ceux qui les appellent à la raison ? »
Non, répond Aujourd’hui, toujours au Burkina : « en essayant de chausser les bottes de Mobutu, il est à parier que ni la chaise vide de l’opposition au dialogue inclusif, ni les sermons et les allers et venues de l’Eglise à cette même table, et encore moins les marches et les nombreuses victimes ne feront reculer Kabila Junior qui est dans une logique de bras de fer. » Et Aujourd’hui de s’interroger également. « Daignera-t-il accepter à minima, un gouvernement d’union nationale, d’où il restera maître du jeu, afin de reprofiler un scénario pour demeurer au pouvoir ? Y a-t-il risque d’une révolution de palais ? Peut-il être emporté par une insurrection ? »
Une insurrection populaire à la burkinabé ?
Le site d’information guinéen Ledejly.com penche pour la dernière hypothèse… « Un dirigeant, aussi fort soit-il, n’a aucune chance face à une désapprobation populaire. Surtout si, comme dans son cas, on recourt à la violence et à la répression. Une telle approche ne peut en effet que galvaniser le camp adverse, estime le site guinéen, et irriter davantage les opposants. C’est d’ailleurs ce à quoi nous assistons. De plus en plus, les Congolais, révoltés par la barbarie dont font montre les forces de l’ordre à la solde du pouvoir, se rallient au front anti-glissement électoral. Et de fil en aiguille, pointe Ledjely.com, les griefs se multiplient. Ainsi, les protestataires commencent à se plaindre du chômage, des coûts prohibitifs de l’éducation, du faible accès aux soins de santé, etc. Des revendications qui pourraient aider à étendre la contestation au-delà du champ politique pour en faire une insurrection populaire comme celle que les Burkinabè nous ont servie il y a deux ans. »
Et on revient au site Afrikarabia qui conclut ainsi : « dans cette situation des plus chaotiques, l’avenir de la RDC est suspendu à trois facteurs : la continuation ou non des violences dans la rue, l’échec ou non du dialogue en fin de semaine et la prise de parole ou non de Joseph Kabila dont beaucoup de chancelleries ne comprennent pas le mutisme. »