A la Une: lundi sanglant à Kinshasa

La même photo un peu partout dans les médias du continent ce matin : on y voit un homme hurlant sa colère, un bâton à la main, devant un véhicule incendié. Manifestant ou casseur, agresseur ou agressé, on ne sait pas trop. En tout cas, le bilan est lourd… 17 morts, selon les autorités ; plus de 50 pour l’opposition.

« Un bilan lourd qui traduit le chaos », soupire le site d’information congolais 7 sur 7. « La marche pacifique anti-Kabila a été violente dans la capitale. Des édifices publics et privés ont été saccagés et brûlés. Pour le ministre de l’Intérieur, Évariste Boshab, poursuit 7 sur 7, il s’agit d’un mouvement insurrectionnel qui a échoué. 'Il est inadmissible, poursuit-il, que les pyromanes sèment la désolation au moment où le dialogue national trouve la solution aux problèmes électoraux posés'. Pour lui, les auteurs de ces actes de barbarie doivent répondre devant la justice. »

« Aux cris de 'Kabila dégage !', la matinée avait commencé sous haute tension dans les différents quartiers populaires de Kinshasa, relate le site d’information Afrikarabia. Barricades, pneus brûlés, portraits du président congolais incendiés, caméras de vidéosurveillance détruites… une véritable 'ambiance de guerre' (…). Des heurts ont rapidement éclaté avec la police qui empêchait l’accès de certains groupes de manifestants aux différents points de rassemblement dans la capitale congolaise. La manifestation a aussitôt été annulée par les autorités et la délégation du Rassemblement de l’opposition, qui organisait la marche, n’a pas pu accéder au bâtiment de la CENI, où elle voulait déposer un mémorandum. »

Afrikarabia qui note par ailleurs que « ces violences interviennent en plein dialogue national. Un forum censé résoudre l’impasse électorale dans laquelle se trouve le pays depuis plusieurs mois. (…) Dans ce contexte, il est fort à parier, estime le site, que la répression sanglante et les morts du 19 septembre risquent de bloquer tout consensus entre majorité et opposition jusqu’à la fin dialogue. Quant au Rassemblement, qui préfère jouer la rue à la table des négociations, il pourrait décider de poursuivre la mobilisation. Hier soir, Joseph Olengankoy, le patron des Fonus, membre du Rassemblement, annonçait une nouvelle marche pour demain mardi. Sera-t-elle suivie ? La RDC n’a jamais été si près de l’implosion. »

Compte à rebours ?

La presse ouest-africaine est tout autant alarmiste… « On a beau ne pas vouloir jouer aux Cassandres, écrit L’Observateur Paalga à Ouaga, on est obligé de reconnaître que le pays de Patrice Lumumba est au bord du précipice, et cela par la seule volonté d’un homme qui veut jouer coûte que coûte les prolongations à la tête de l’Etat. Nous en voulons pour preuve, poursuit L’Observateur, cette volonté affichée de renvoyer les élections en fin 2018 avec une transition de deux ans que lui-même, Joseph Kabila, conduirait ; chose que l’opposition et la Conférence épiscopale refusent catégoriquement. »

« Kabila joue avec le feu », renchérit Le Pays, toujours au Burkina. « Le président congolais est dans une logique de confiscation du pouvoir et il est prêt à utiliser tous les moyens de répression possibles pour parvenir à ses fins. » Mais, « le peuple a toujours le dernier mot, conclut le quotidien ouagalais. C’est une question de temps. Et avec les événements d’hier, l’on peut dire que le compte à rebours a commencé en RD Congo. »

Enfin, le quotidien Aujourd’hui hausse encore le ton… « Nous y voilà : ainsi donc, Kabila Junior a peur d’être décoiffé par une insurrection comme l’a été Blaise Compaoré au Burkina en octobre 2014 ? Qui a dit que le syndrome burkinabè n’existait pas ? N’est-il pas temps de tordre le coup au mantra, maintes fois seriné faisant état de l’impossibilité, d’un déplacement de la bourrasque sahélienne dans cette humide et luxuriante Afrique centrale ? Qui a prétendu que l’insurrection burkinabè n’était pas exportable ? »

Et Aujourd’hui de conclure : « à 3 mois de la fin du séjour constitutionnel de ce Mobutu édulcoré à la tête de la RD Congo, et avec l’aperçu de la répression d’hier, le chaos à la fin de l’année est presque sûr. Et de facto, un départ de Kabila. »

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