Beaucoup de réactions bien sûr dans la presse du continent après la condamnation de l’ancien président tchadien.
« Comme il fallait s’y attendre, pointe le quotidien Walfadjri à Dakar, Hissène Habré est condamné à la perpétuité. Déclaré coupable de plusieurs crimes dont celui de +viol+, en rapport avec les exactions commises au Tchad durant son mandat, il va purger sa peine à la prison du Cap Manuel où une suite lui a été aménagée. »
C’est l’épilogue d’un procès de dix mois, soupire L’Observateur Paalga à Ouaga, « mené de main de maître par le Burkinabè Gustave Kam, 93 témoins représentant plus de 4.000 victimes enregistrées comme parties civiles face à un prévenu pour le moins rétif qu’il a fallu, de guerre lasse, trimbaler manu militari et qui, bien qu’il n’ait pas desserré les dents, a dû écouter les récriminations des survivants et le silence pesant de ses victimes. »
Les réactions fusent… « La justice africaine fête la victoire », clame la directrice de cabinet du ministre de la Justice, Me Sidiki Kaba, interrogée par le site d’information Seneweb. Le juge Baltasar Garzon, ancien juge d’instruction de Madrid, tombeur de plusieurs dictateurs d’Amérique Latine, affirme lui avoir « partagé la joie des victimes de Hissène Habré. Ce verdict leur donne de l’espoir. Il est le premier chef d’Etat africain jugé en Afrique par les Africains. »
Bravo aux Chambres africaines extraordinaires !
En effet, se félicite le site d’information Guinée Conakry Infos, « la condamnation à vie d’Hissène Habré, c’est l’Afrique qui juge l’Afrique en toute dignité, grâce à la compétence des Chambres africaines, une juridiction créée par l’Union africaine en partenariat avec le gouvernement sénégalais. Elle démontre par le haut que l’impunité doit être extirpée de toute gouvernance responsable pour le progrès de l’Afrique. »
« Bravo aux Chambres africaines extraordinaires ! », renchérit le quotidien Aujourd’hui au Burkina. « C’est un procès pédagogique qui fera date. Pour une fois, les Africains ont administré la preuve qu’ils étaient capables de juger leurs princes, pardon leurs propres bourreaux. Pour la première fois dans l’histoire, un ancien chef d’Etat africain a été jugé, avec brio, par une juridiction purement africaine. 'L’Afrique est devenue propriétaire de son avancée judiciaire', a lancé d’ailleurs, un tantinet goguenard, Me William Bourdon, l’avocat qui, depuis 10 ans, rapporte encore Aujourd’hui, n’a pas lâché Habré d’une semelle. »
Adieu la CPI ?
En effet, relève aussi le site d’information Ledejlely.com en Guinée, « avec le procès et le verdict prononcé hier contre l’ancien président tchadien, l’Afrique franchit une étape essentielle de son histoire. Celle de sa capacité à faire face à son passé avec responsabilité et devoir. Les efforts qui ont amené l’Union Africaine à consentir à la création de ce tribunal spécial doivent être salués comme il se doit. Au-delà des victimes d’Hissène Habré, c’est la souveraineté judiciaire du continent africain qui s’élève à un échelon supérieur. Si les acteurs de la société civile ne retombent pas dans la torpeur, l’intervention de la Cour pénale internationale ne sera bientôt d’aucune nécessité en Afrique. »
« Les Chambres africaines extraordinaires sont un signal fort, insiste Le Pays, toujours au Burkina, une expérience porteuse d’espoir, qui devrait inspirer les Africains à se doter de tribunaux permanents du genre. Comme par exemple la Cour africaine de justice, qui a seulement besoin d’être plus opérationnelle avec des moyens conséquents et des textes encore plus clairs. En tout cas, pointe encore le quotidien burkinabé, ce ne sont pas les dossiers qui manquent sur le continent. Aujourd’hui, c’est Hissène Habré. Demain, à qui le tour ? En tout état de cause, l’Afrique semble aujourd’hui engagée dans un processus irréversible auquel il sera de plus en plus difficile de résister. Il faut seulement espérer qu’il se poursuivra et se renforcera avec la prise de conscience de plus en plus grande des peuples Africains. Les dictateurs du continent n’ont qu’à bien se tenir. »