Après deux mois de contestation de la loi travail, la CGT peut-elle suffisamment mobiliser ses adhérents et ses sympathisants pour mettre le pays à l’arrêt en bloquant les raffineries ?
Question posée ce matin par bon nombre de quotidiens, à commencer par Libération. Eh bien, c’est un pari « hasardeux », répond le journal. La stratégie de la CGT « s’appuie d’abord sur une mobilisation d’ampleur limitée. […] Elle se déroule ensuite sur fond de division syndicale. » Et puis « l’opinion, enfin, plutôt hostile au projet, est heurtée par les violences qui se déroulent en marge des cortèges, et le sera sans doute aussi dans le cas où le blocage deviendrait général. Dans ces conditions, conclut Libération, le tout ou rien dans lequel s’engage la CGT comporte un risque majeur : s’enfermer dans un jusqu’au-boutisme qui finisse par affaiblir le mouvement social dans son ensemble. »
Le Figaro, lui, parle de « terrorisme social » : « voilà des années que la CGT s’est lancée dans une inexorable fuite en avant, sous forme de radicalisation et parfois de violence, sans que personne s’en émeuve vraiment, dénonce le quotidien d’opposition. Repliée sur quelques bastions, cette vieille centrale rouillée, qui représente moins de 3% des salariés, s’illustre par sa détermination à détruire tout ce qui peut l’être dans l’économie française. Opposée à tout par principe, elle guerroie contre les réformes, paralyse la modernisation des services publics, empoisonne la vie des entreprises et pourrit celle des usagers. »
Porte de sortie ?
Les Echos renchérissent avec un autre mot : « sabotage »… Oui, « c’est bien de sabotage qu’il s’agit, s’exclame le quotidien économique. La CGT se sent en danger et sort les griffes ; la CGT n’a plus les moyens de susciter une mobilisation d’ampleur et d’engager une vraie guerre, alors elle choisit la guérilla. Médiatique et sociale. Philippe Martinez pose, jetant un pneu dans un brasier, à la Une du JDD. La CGT pousse ses feux partout. En bloquant les raffineries, en appelant à la grève illimitée à la RATP. »
Pour Ouest France, c’est la « chienlit »… « La CGT et FO ont choisi la méthode forte. Il n’y a pas besoin de beaucoup de cheminots, de dockers ou de raffineurs pour désorganiser le pays. Quelques centaines d’entre eux peuvent mettre la pagaille et jouer sur la panique. Ils espèrent ainsi contraindre le gouvernement à négocier. Voire à retirer le texte […]. Cette situation, partie d’une gauche qui affaiblit la gauche, est explosive, car elle pousse chacun à s’en prendre à l’autre. De gré – de préférence – ou de force, il faut très vite trouver une sortie pacifique. »
En effet, « une porte de sortie, et vite ! », lance Le Parisien. « Deux mois et demi après le début de la protestation contre la loi Travail, le pays est plongé dans la plus grave crise sociale du quinquennat. Bien malin qui peut dire comment tout ça va finir car ni le gouvernement ni la CGT ne semblent prêts à céder. Sauf qu’en attendant, le quotidien des Français s’en ressent. »
Et finalement, commente Le Parisien, « la France n’arrive pas à sortir de son état de congélation, minée par des archaïsmes politiques et syndicaux qui transforment n’importe quelle table de négociations en ligne Maginot : personne n’avance, personne ne recule. Et la France piétine. »
Emmanuel Macron, lui, entend avancer… Dans un entretien aux Echos, le ministre de l’Economie estime qu’il faudra aller plus loin que la loi El Khomri. « Il faudra élargir le champ de la négociation collective au niveau de l’entreprise à d’autres domaines, affirme Emmanuel Macron. Plus on ira vers l’entreprise, plus ce sera efficace. »
Le Danube n’est pas bleu…
A la Une également : la présidentielle en Autriche, avec la victoire sur le fil du candidat écologiste face au candidat d’extrême-droite… Pas de quoi sauter au plafond, préviennent Les Dernières Nouvelles d’Alsace : « Tout triomphalisme serait malvenu. La forêt viennoise à la Strauss reste sombre, le Danube n’est pas bleu. Car la crise est loin d’être terminée : dans deux ans, précise en effet le quotidien alsacien, se dérouleront les législatives qui détermineront le vrai pouvoir à Vienne. Or le FPÖ de Hofer dispose d’une formidable assise régionale capable de le mener à la chancellerie, même avec 49 % des suffrages. Alors que les écologistes de Van der Bellen ne sortent guère des milieux “branchés”. »
En effet, souligne Le Républicain Lorrain, « la défaite du FPÖ ne signe pas son échec. Fort de 49,7 % des suffrages, Nicolas Hofer réalise, selon ses propres termes, “un investissement pour l’avenir”. La banalisation, la fameuse dédiabolisation de l’extrême droite n’est vraiment plus un fantasme ! Même le poids de l’Histoire ne suffit plus à préserver de la tentation du populisme et de l’autoritarisme les Etats qui en furent les plus grands perdants. Là où jadis l’antisémitisme fit acclamer les troupes vert-de-gris de l’Anschluss, la xénophobie face à la crise des réfugiés tient aujourd’hui lieu de promesse politique. »
Enfin pour La Dépêche du Midi, « cette réaction de “peur”, viscérale, presque instinctive, qui porte l’électeur vers un extrémisme au vocabulaire brutal, constitue un immense défi pour l’Europe démocratique. Faudrait-il en tremblant crier au fascisme à toutes les élections et ne rien faire entre elles ? Les appels d’intellectuels, d’artistes ou d’écrivains qui se sont succédé ces derniers jours en Autriche n’ont peut-être pas été vains. Mais, s’interroge encore La Dépêche, le “sursaut républicain” qui projette aujourd’hui sur le devant de la scène européenne un premier chef d’Etat écologiste, pourra-t-il indéfiniment se reproduire quelles que soient les circonstances et quels que soient les pays ? »
Coup de massue pour la recherche !
Les prix Nobel français sont en colère… Ils font la Une du Monde. Dans une tribune publiée par le quotidien du soir, sept prix Nobel protestent contre l’annulation par décret de près de 200 millions d’euros dans le budget de la recherche. Les signataires dénoncent un « coup de massue. » Ils regrettent une décision « à rebours de ce que font les pays étrangers » et redoutent « un décrochage » de la France dans le domaine scientifique. Ces restrictions budgétaires devraient limiter les investissements dans les laboratoires. Le CNRS et le CEA sont particulièrement visés.
Printemps pourri…
Enfin, y’a plus de saison ma brave dame ! Le Parisien consacre une pleine page aux errements météorologiques de ce printemps en France. Un printemps pourri… « A Paris, entre dimanche et hier, près de 50 mm d’eau sont tombés. C’est presque ce qu’il tombe pendant un mois complet de mai “normal”. Le reste de la France, à part les heureux habitants de la côte méditerranéenne, il faisait 23 degrés à Nice, n’a pas été épargné par les ondées ni les caprices du thermomètre : 13 degrés en Ile-de-France, 18 à Bordeaux, contre 20 à 22 en normales saisonnières. » Le pire, conclut Le Parisien, c’est que « ce mauvais temps va gâcher notre quotidien au moins jusqu’au début du mois de juin. »