La presse africaine ne trouve pas de mots assez forts pour rendre hommage à l'artiste. « Une étoile totémique tombe du firmament », titre le Paysdu Burkina Faso. Pour Le Djely, Papa Wemba « était tout simplement une icône de la musique africaine au point d’en être un des porte-étendards dans le cercle sélect de la World music. »
Ces articles dithyrambiques reviennent sur l'incroyable carrière de Papa Wemba sans passer sous silence un épisode trouble de sa vie : les quatre mois de prison qu'il effectue en France, en 2004, pour avoir voulu aider des compatriotes à obtenir des visas. Papa Wemba « n'était pas un saint », écritAujourd'hui au Faso. C'était en tout cas un dieu de la musique.
Les raisons du succès de Papa Wemba
Papa Wemba doit sa renommée à sa voix, rappelle GuinéeConakry.info: une voix « haute, très caractéristique » qu'il a forgée dans les chorales religieuses où il a débuté. « Papa Wemba tenait sa passion du chant de sa mère, une "pleureuse" qu'il accompagne aux veillées funèbres », raconte le site. Viennent ensuite les influences anglo-saxonnes dans les années 60, puis la rumba traditionnelle qu'il dépoussière « en y introduisant des rythmes rock et des sonorités électriques ».
Papa Wemba devient une star, d'abord en Afrique centrale, puis dans le monde entier, grâce notamment à Peter Gabriel. Pendant trois ans, il assure la première partie de sa tournée européenne et américaine. Papa Wemba est connu y compris au Japon, souligne GuinéeConakry.info. Le pays est « emballé par ce dandy africain qui s'habille chez les grands couturiers ».
Papa Vemba, une voix et un style
Alors qu'il vit en Europe, il devient « le "pape" de la SAPE, la Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes », raconte toujours GuinéeConakry.info. Ce phénomène d'abord vestimentaire « fondé sur une élégance flamboyante et exagérée » se transforme peu à peu en « une philosophie du ''carpe diem'' couvé dans l'actualité africaine », explique le site d'information. « Forme de rébellion anti-pauvreté et anti-déprime, la SAPE est aussi une façon de lutter contre la dictature de l'abacost, version locale du costume trois-pièces, et uniforme quasi officiel des hommes sous le régime de Mobutu. »
Papa Wemba, un artiste engagé
Comme l’explique Le Djely, au-delà des mélodies, des rythmes, des pas de danse et de la sape, Papa Wemba, c'est « une époque, une histoire ». Boubacar Sanso Barry écrit dans les colonnes du journal : « A l’image de ce qu’a été le couper-décaler durant la crise en Côte d’Ivoire, la rumba congolaise (...) a surtout servi de refuge pour de nombreux Congolais dont le pays, pris en tenaille entre les rivalités Est-Ouest durant la guerre froide et la dictature de Mobutu, n’offrait aucune perspective viable. Appauvris et rendus misérables dans un vaste et richissime pays, les Congolais, à peine sortis du joug colonial, ont accueilli à bras ouverts ce genre musical (...) et les joies fugaces distillées dans les nombreux cabarets kinois. »
Boubacar Sanso Barry poursuit en expliquant comment la rumba a intégré la sape et l'atalaku, phénomène qui consiste à vanter les mérites de quelqu'un en échange d'argent. Et de conclure : « Ainsi donc, Papa Wemba et tous ceux de sa génération, sont quelquefois perçus comme ayant pactisé avec les tenanciers du pouvoir ou avec ceux qui, pillant le pays grâce à la complicité des multinationales, contribuent à son appauvrissement. Mais on l’aura compris. Confrontés à une situation qu’ils savaient immuable, ils auront choisi d’aider leurs compatriotes à accepter une réalité qui ne pouvait être changée. Ce qui en soi, est une forme d’engagement. »
Le riche héritage de Papa Wemba
Comme l'écritAujourd'huiau Faso, « l’homme part, mais reste immortel, de par son œuvre ». Son œuvre, ce sont bien sûr ses chansons et ses plus de 60 albums. Mais Papa Wemba nous laisse aussi tous les musiciens sortis de son école, estime le journal, et « Parmi ses disciples figure le grand Koffi Olomidé ».
Comme l'écrit Le Journal de Bangui, « la musique de Papa Wemba continue à vivre ».