A la Une: déchéance, le feuilleton continue…

« Sur les marchés, les gens nous parlent de chômage, pas de déchéance » : confidence d’un député socialiste à Libération. Et pourtant, cette affaire de révision de la Constitution continue d’empoisonner la vie politique française. Et le feuilleton n’est pas terminé, loin de là. Hier, le projet de révision constitutionnelle a été finalement approuvé à l’Assemblée nationale par 317 voix pour et 199 contre. « Les députés ont donc ouvert la voie à la modification de la Constitution, relève La Presse de la Manche, mais il reste encore un parcours assez complexe à effectuer, puisque le texte qui part au Sénat devra être voté dans les mêmes termes que ceux de l’Assemblée, et qu’il n’est pas possible d’échapper à cette règle, en donnant le dernier mot, comme pour les autres lois, au Palais-Bourbon. Or, le Sénat a déjà fait savoir que le texte, pour une part, sera réécrit. Il faudra donc revenir devant l’Assemblée nationale. »

Bref, le feuilleton n’est pas près de se terminer, comme le précise Libération : « la patate chaude arrive le mois prochain au Sénat. Et il paraît impossible que les sénateurs votent à l’identique le texte de l’Assemblée. Ils ont maintes fois affirmé qu’il n’était pas question d’accepter une réforme qui "ouvre le champ de l’apatridie". Or cette "ligne rouge" a été franchie puisqu’à la demande de nombreux socialistes - et de quelques centristes -, le gouvernement a renoncé à réserver aux seuls terroristes binationaux la déchéance de nationalité, comme le prévoyait le premier projet. En principe, poursuit Libération, le Sénat devrait donc réécrire le texte en rétablissant la distinction entre nationaux et binationaux. Réécriture inacceptable pour la majorité de gauche à l’Assemblée, ce qui bloquerait le processus de réforme constitutionnelle. »

Résultat, s’exclame L’Opinion, « la révision constitutionnelle est en état de mort clinique. (…) On sait maintenant que le Sénat ne votera jamais le même texte que l’Assemblée. (…) On ne voit évidemment pas quel stratagème François Hollande va tenter pour s’extraire de cet invraisemblable bourbier, ni quelle manœuvre il va lancer pour imputer à la droite son échec. » 

La Montagne renchérit : « la procédure de révision qui aurait dû être, dans l’esprit de ses initiateurs, un grand moment d’unité nationale contre le terrorisme jihadiste, tout bénef pour le pouvoir, cette révision risque désormais de s’achever en enterrement de première classe ! » 

« Ambiguïté et confusion », déplore Le Figaro. « En trois mois, le chef de l’État aura réussi à diviser son camp, à provoquer le départ de sa garde des Sceaux et, comme par effet de contagion, à semer la discorde à droite. Beau résultat pour l'une des rares bonnes idées qu’il ait proposées aux Français depuis 2012… » 

Alors, quelle va être la suite du feuilleton ? Ouest-France nous dit tout…

« Dans six semaines environ, on va donc assister, au Sénat, au vote d’un texte différent. Dans six semaines, on ne pourra toujours pas dire si les deux Assemblées seront capables de s’entendre sur une formulation identique. Ni si François Hollande peut espérer, sur une mouture amendée, réunir les trois cinquièmes des voix pour éviter un camouflet à Versailles. »

Et Ouest-France de s’interroger : « Et si on arrêtait les frais ? Si on se contentait de constitutionnaliser l’état d’urgence ? Si on revenait à une loi ordinaire étendant la déchéance des droits afférents à la nationalité, et la perpétuité incompressible, aux auteurs d’attentats ? Tant de dégâts ont été commis qu’il ne sert à rien de courir derrière un symbole que les conditions mêmes de son adoption ont terni. C’est se bercer d’illusions, conclut Ouest-France, de considérer que de deux désunions – de droite et de gauche – peut naître une union. » 

Enfin, il faut vite en finir également pour La Croix : « Il faut désormais sortir rapidement de cette ornière, estime le quotidien catholique. Car chacun y perd un peu plus chaque jour, en particulier le gouvernement qui passe son temps à colmater les brèches de ses propres désaccords. Mais aussi la droite, qui se divise, et la gauche, qui se déchire. Piteux spectacle. À quatorze mois de la prochaine élection présidentielle, il est plus que temps de se demander comment faire de cette année qui s’ouvre une année utile, s’exclame La Croix. Utile pour améliorer la vie des Français, pour rassurer ceux qui sont inquiets, pour soulager ceux qui souffrent, pour élaborer des projets d’avenir. Utile pour ceux qui se font une autre idée de la démocratie. » 

On revient à Libération qui sort un dossier explosif ce matin à propos du groupe nucléaire français Areva…

« Areva : les dessous d’un scandale d’Etat », titre Libération. Le fond de l’affaire : le géant nucléaire français « avait acheté en 2007 la société minière Uramin pour 1,8 milliard d’euros et ses trois mines en Afrique. Quatre ans plus tard, les gisements étant inexploitables, le groupe a jeté l’éponge. Plus de 2,5 milliards d’euros sont partis en fumée. Deux informations judiciaires ont été ouvertes en mai 2015. »

Alors, ce que révèle Libération ce matin, c’est que lors du rachat d’Uramin, Areva aurait dissimulé des documents à l’Etat, principal actionnaire. Puis faussé ses comptes pour masquer le fiasco. Le responsable de l’opération chez Areva apparaît lié financièrement à d’ex-actionnaires d’Uramin. Qui plus est, le mari de la présidente d’Areva, Anne Lauvergeon, qui a spéculé sur l’acquisition, détenait de nombreux documents confidentiels sur le dossier.

Commentaire de Libération : « les documents que nous présentons sont accablants pour l’ancienne équipe dirigeante d’Areva et d’abord pour Anne Lauvergeon qui présida le groupe nucléaire depuis sa création, en 2001, jusqu’à son départ, en 2011. (…) Le dossier est aussi accablant pour l’Etat-actionnaire. Il ne pouvait pas ne pas savoir. »

Enfin, il fait la Une du Parisien ; les Français l’ont rarement eu en mains ; il est très prisé des trafiquants en tout genre et il devrait bientôt disparaître. C’est… le billet de 500 euros !

« C’est devenu l’ennemi public numéro 1, s’exclame Le Parisien. Un dangereux criminel mêlé à des affaires de blanchiment, de trafics de stupéfiants, de travail dissimulé, de proxénétisme, et même de financement d’actions terroristes. » Il s’agit donc du billet de 500 euros. « Au Royaume-Uni, les services secrets de sa Majesté l’ont carrément rebaptisé "Ben Laden", pointe le journal.L’anecdote illustre combien ce rectangle mauve de 16 cm sur 8 est associé au crime et cristallise les peurs. La Commission européenne vient de l’accuser elle aussi de financer l’économie mafieuse et le terrorisme, notant qu’il était très demandé, en raison de sa valeur faciale élevée et de son encombrement minimum. De fait, 1 million d’euros en coupures de 500 pèse tout juste 2 kilos.

Facile à transporter et à dissimuler, le billet mauve devrait donc être retiré de la circulation : décision de la Banque centrale européenne.

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