David Bowie l’entrepreneur

Le roi de la pop David Bowie disparu dimanche a aussi été un entrepreneur innovant utilisant tous les supports à sa disposition pour diffuser et financer sa carrière.

Il est le premier chanteur à lancer des obligations. En 1997, les Bowie Bond, garanties par son catalogue font swinguer Wall Street. David Bowie a alors 50 ans et déjà une très belle carrière derrière lui. Il est surtout l'un des rares chanteurs à avoir gardé la main sur ses droits d'auteurs. Un réflexe d'homme d'affaires avisé, mais aussi d'artiste soucieux de préserver son oeuvre.

Comment valoriser ce pactole ? En levant une obligation adossée aux revenus générés par son répertoire, les 300 chansons sorties entre 1969 et 1990, lui suggère un banquier de Wall Street. Il va lever ainsi 55 millions de dollars, remboursable dans dix ans. L'assureur Prudential rafle tous les titres qui offrent une rentabilité de 7,9 %. On croit rêver !

Ces obligations feront des émules ?

Le banquier-conseil de l’icône de la pop renouvelle l'opération avec James Brown, Rod Stewart. Mais ce mode de financement restera anecdotique dans l'industrie musicale parce qu'il implique la détention des droits d'auteur par l'artiste. En revanche, à Wall Street ces obligations sont une étape clé dans le développement de la titrisation qui va se répandre à grande échelle jusqu'à la crise de 2008.

L'obligation Bowie est adossée à un actif pour le moins original, les droits de propriété intellectuelle. Faute de données historiques sur l'évolution de ce capital atypique, l'analyse du risque est quasiment impossible, c'est pourquoi ces produits financiers demeurent exceptionnels. D'ailleurs les Bowie Bonds deviennent des obligations pourries en 2004 quand Internet commence à tailler dans les revenus classiques des auteurs interprètes. Mais le chanteur lui a toujours la main sur ses droits.

David Bowie, pionnier dans la musique en ligne

L'année où il lance ses obligations, il est aussi le premier chanteur à proposer sur la toile un titre en téléchargement. Deux ans plus tard, il sort l'album Hours dans les mêmes conditions. Il comprend très vite qu'Internet redistribue les cartes.

Dans une interview donnée au New York Times en 2002, il explique que la musique sera à l'avenir un bien comparable à l'eau ou à l'électricité. Que le concert sera la pierre angulaire de l'artiste et non plus le disque produit par les labels qu'il voyait aussi disparaître. Il annonce même la fin des droits d'auteur. Toutes ces prophéties ne se sont pas réalisées, mais elles ont nourri le débat dans une industrie en pleine mutation.

Un entrepreneur du XXIe siècle

Il a lancé plusieurs entreprises innovantes dans le numérique, le Bowie Net par exemple. Ce fournisseur d'accès à Internet proposait en prime, en avant-première ou en accès exclusif, les produits de l'artiste. La Bowie Bank, une banque en ligne, a été mise sur pied dans la foulée.

Ces projets disruptifs vont péricliter quand la bulle Internet éclate. Même s'il a amassé une jolie fortune, estimée à 200 millions d'euros, c'est d'abord le meilleur moyen de distribuer ses oeuvres avec les technologies existantes qui semble avoir motivé la carrière d'homme d'affaires de ce musicien.

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