« Grèce : les électeurs redonnent leur confiance à Alexis Tsipras », s’exclame L’Humanité en première page. L’Humanité qui jubile dans son éditorial : « Le peuple grec n’en finit donc pas de donner à l’Europe une leçon de maturité politique. En renouvelant sa confiance à Syriza, il a douché les espoirs de la droite et des dirigeants de l’UE d’assister à la fin de ce qu’ils appelaient la " parenthèse Tsipras ". (…) Les électeurs grecs ont compris que derrière leur acharnement à propos de la dette, les dirigeants de l’UE n’avaient finalement qu’un objectif : provoquer la chute du gouvernement. Et ils ont déjoué leurs manœuvres. »
Le Figaro ne partage pas cet enthousiasme. « Son bref parcours de sept mois à la tête du pays aurait pu largement suffire à le discréditer. Ce prestidigitateur électoral a pourtant réussi à convaincre les Grecs qu’il pouvait encore incarner l’avenir. (…) Reste à savoir ce qu’Alexis Tsipras va faire de cette victoire, pointe Le Figaro. Sa capitulation estivale devant les prêteurs ne l’a pas empêché de s’imposer comme un dirigeant charismatique, capable de susciter une quasi-unité nationale autour d’un plan de sauvetage négocié sans marge de manœuvre. Puisqu’il a promis de le respecter, il devrait ouvrir sa coalition aux modérés au lieu de prolonger son alliance avec les souverainistes de l’Anel. Les Européens pourraient l’y encourager en acceptant d’aménager la dette qui étouffe le pays. »
Et Le Figaro de conclure : « Espérons que la prochaine métamorphose d’Alexis Tsipras en dirigeant responsable soit la bonne. »
Finalement, relève La Montagne, « le paradoxe, c’est que sort des urnes un autre Syriza. Ce n’est plus le parti de la gauche radicale de janvier qui revient au Parlement d’Athènes. C’est un parti en voie de social-démocratisation qui accepte les compromis européens. Les ultras sont partis sur leur Aventin et ont été désavoués. Désormais, Alexis Tsipras a une formation politique à sa main qui devrait lui permettre d’avoir une majorité parlementaire beaucoup plus sûre, même si ça passe par une coalition. »
Alors, dès à présent, pointe Libération, Alexis Tsipras devra faire face à trois failles majeures. Tout d’abord la faille démocratique : « Pourquoi voter, en effet, alors que les diktats imposés de l’extérieur peuvent contredire le choix des électeurs ? Cet été, les images désastreuses de députés contraints d’entériner, sans même avoir le temps de les lire, les réformes des créanciers, dans un Parlement réduit à une chambre d’enregistrement, ne peuvent qu’avoir des conséquences dangereuses, estime le journal. En imposant une forme de nihilisme dont seuls les extrêmes peuvent profiter. Et notamment les néonazis d’Aube dorée, seule force parlementaire avec les communistes fossilisés du KKE, à s’être opposée à ces diktats. »
Deuxième faille pour Tsipras, poursuit Libération, la faille européenne : « La Grèce, cobaye de l’austérité ? Même s’ils restent europhiles et attachés à l’euro, de nombreux Grecs en sont persuadés et ne voient désormais plus d’horizon au bout de l’interminable tunnel des sacrifices exigés pour le remboursement de la dette. »
Enfin, la faille géopolitique, pointe Libération, avec l’afflux des migrants. « Ces arrivées massives aussi bien que leur gestion chaotique sur des îles totalement débordées sont venues rappeler que la Grèce est bien la dernière frontière face à l’Orient tout autant que le maillon faible de la forteresse européenne. »
Panique au PS ?
A la Une également, la politique en France, avec la fébrilité du PS à l’approche des régionales. « Au PS, c’est sauve-qui-peut ! », s’exclame Le Parisien en première page. « Signe de panique, ou méthode Coué ?, s’interroge le journal. En annonçant à la surprise générale l’organisation d’un référendum citoyen sur l’unité de la gauche, mi-octobre, Jean-Christophe Cambadélis entend mettre la pression à l’autre gauche - écologistes et Front de gauche - qui a fait le choix de partir sous ses propres couleurs aux régionales. »
Commentaire du Parisien : « Le lancement de cette consultation à moins de trois mois des élections témoigne surtout de la fébrilité qui gagne les rangs du PS à l’approche de ce qui pourrait bien ressembler à une bérézina. Et, en demandant aux électeurs s’ils sont favorables ou non à l’unité des partis de gauche avant le premier tour, le patron des socialistes s’expose à un autre revers : celui que son initiative fasse un flop. Ce serait rajouter un camouflet à la défaite. »
« Le PS cède à la panique à l’approche des régionales » : c’est la manchette du Figaro pour qui « l’appel à l’union de Cambadélis n’est que la grosse ficelle d’un parti trop faible. (…) En faisant porter aux autres partis la responsabilité d’une éventuelle victoire du FN, le PS cherche à les culpabiliser plutôt qu’à s’inquiéter de son propre effondrement. Avec cette transposition laïque de la parabole de la paille et de la poutre, le Parti socialiste s’expose à une fin de non-recevoir. »
« Il paraît évident, souligne La Dépêche du Midi, que les écologistes, de même que le Front de gauche ou encore, de ci de là, quelques francs-tireurs régionaux, ne souhaitent pas entendre raison, espérant ainsi recueillir les plumes perdues des socialistes. Ce pari, pour incertain qu’il soit, nourrit bien sûr les rêves militants, il satisfait leurs illusions partisanes, comme si, perdu pour perdu, ils se délectaient inconsciemment à l’idée de jeter toute la gauche avec l’eau du bain. Retrouver, coûte que coûte, l’unité, reconstituer ce socle, aujourd’hui ébranlé, autour de quelques valeurs communes qui témoignent d’une fidélité à la gauche : ce n’est pas une opération de rafistolage ni de la chirurgie esthétique, c’est tout simplement, soupire La Dépêche, une intervention comme on en fait aux urgences lorsqu’on veut éviter le pire. »
Où sont passés les 25 milliards du CICE ?
Enfin, sans doute une belle polémique en vue : le rapport 2015 sur le CICE, le crédit d’impôt compétitivité emploi, sera rendu public mercredi. Mais Libération a pu en avoir connaissance. « Où sont passés les 25 milliards ? », s’interroge Libération.
Ce rapport, affirme le journal, « dresse un tableau en demi-teinte de la mesure phare du quinquennat Hollande. Si le dispositif, deux ans et demi après sa mise en place, est bien monté en puissance, son ciblage pose question. Censé redonner de la compétitivité aux entreprises, notamment industrielles, et plus encore à celles exposées à la concurrence internationale, il continue de profiter davantage, en proportion de leur poids dans l’économie, aux sociétés non exportatrices. Ses effets, surtout, se font encore attendre, pointe Libération. L’année dernière, il semble même que son impact ait été " mangé " par les hausses de salaires, au lieu de bénéficier, notamment, à l’investissement. (…) Rien n’est perdu cependant, veut encore croire le journal. Le gouvernement s’attend à une forte hausse de l’investissement des entreprises en 2016 (+4,9 %), « afin de faire repartir durablement l’économie ». « Il faut dire que d’ici là, les entreprises auront accumulé quelque 50 milliards d’euros de CICE. »