Depuis la théorie des Idées, formulée par le philosophe de la Grèce antique Platon, le concept d’une « conscience collective globale » qui serait la source de toute pensée humaine n’a cessé pendant des siècles d’agiter les petits et les grands ciboulots. Mais dit comme ça, ça fait peur ! D’où le terme de « noosphère », imaginé et introduit par le géochimiste Vladimir Vernadsky et le paléontologue Pierre Teilhard de Chardin. Le mot désigne la « sphère de la pensée humaine ». Ce concept qui apparait un peu fumeux, voire stratosphérique, se nomme également « extelligence ».
Il représente l’ensemble des systèmes et des infrastructures permettant la diffusion de la culture et du savoir, et constituerait notre « cerveau collectif » qui a pris, grâce à internet, une dimension planétaire. Hélas, dans deux ou trois siècles à peine, toutes les informations emmagasinées aujourd’hui sur le web se seront volatilisées. Pire, les générations futures, déjà condamnées à une perte de mémoire totale, retourneraient à l’âge de pierre en cas de panne généralisée de réseau. Comment préserver et transmettre nos précieuses connaissances ?
C’est presque simple ! Il y a trois ans, des chercheurs étaient parvenus à encoder un enregistrement mp3 du discours I have a dream de Martin Luther King dans des brins d’ADN, la molécule où sont consignées les informations génétiques du vivant. Cette technique d’archivage est quasiment éternelle, viennent de prouver les scientifiques de l'École polytechnique fédérale de Zurich en Suisse.
Ils se sont inspirés des méthodes de séquençage du génome, permettant aux paléontologues d’étudier des os fossilisés. Les chercheurs ont préalablement glissé des données dans des brins d’ADN, qu’ils ont placés ensuite dans des nano-sphères de silice. Après un passage au four à environ 70 degrés, afin de simuler une détérioration due au temps correspondant à un million d’années, ils ont réussi à récupérer sans dommages les informations encodées.
Un centimètre cube d’ADN serait capable d’archiver un million de giga-bits de données. En revanche, des centaines de milliers de kilos de cette « bio-mémoire » du web seront nécessaires pour transmettre aux prochaines générations tout le contenu de notre internet boulimique, qui devrait bientôt peser 44 000 milliards de giga-octets.
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