A une semaine de la présidentielle contestée, l’arrivée du représentant de la communauté est-africaine, le président ougandais Museveni, pour tenter de trouver une solution à la crise burundaise, ne convainc pas beaucoup. En tous les cas pas le quotidien burkinabè Le Pays, qui rappelle qu’au même moment, « deux opposants ougandais prétendant au fauteuil sacré du Yuweri Museveni, ont été jetés au cachot », simplement parce qu’ils sont contre sa réélection à 70 ans, « après bientôt trente ans passés au pouvoir » estime Le Pays. « La démocratie, il s’en soucie comme d’une guigne, peut-on lire, même s’il s’amuse à insulter l’intelligence de la planète en déclarant, sans ciller, qu’il n’y a pas meilleur démocrate que lui ; on se croirait dans un cirque ». Le Pays ajoute plus loin : « s’il arrive au Bujumbura, pour faire couler la barque de la démocratie au Burundi, pour le bonheur de tous les autocrates du continent, alors, c’est l’homme de la situation ».
Climat tendu à Bujumbura
Comme à son habitude, le quotidien Iwacu a fait un travail extraordinaire ce matin, en allant enquêter dans les quartiers populaires de la capitale hostiles au président Nkurunziza. Le reportage s’arrête notamment à Mutakura : « Des boutiques fermées, des avenues fantômes, de petits marchés moribonds, une circulation inexistante le soir, voilà le visage de ces quartiers à l’origine très vivants. [...] Un même détail se fait remarquer sur la plupart des maisons. Un lourd cadenas qui pend sur les portes », peut-on lire. En photo d’illustration, on retrouve une de ces maisons abandonnées, en mauvais état, avec un tronc d’arbre par terre qui jonche le sol dans la cours. « Les habitants de ces demeures ont plié bagages depuis longtemps », rapporte les journalistes d’Iwacu. « Un quartier désert » ou presque, qui vit dans « la psychose permanente » selon Iwacu, avec un calme étrange, comme « celui qui précède la tempête » lit-on. Il y a dix jours, selon le journal burundais, une descente de police dans le quartier de Mutakura, officiellement pour arrêter des malfaiteurs et des assaillants, a fait près d’une dizaine de morts.
Le quotidien de « toutes les voix du pays », organise une immense pétition pour tenter de défendre la liberté de la presse au Burundi extrêmement menacée depuis le début de la crise.
Museveni : visite de courtoisie ?
Le quotidien New vision publie d’abord des photos de l’arrivée de Museveni à Bujumbura hier. On sait qu’il a fait un long voyage par la route pour arriver jusqu’à la capitale burundaise depuis Kigali au Rwanda. Et, on le retrouve justement en photo, avec son grand chapeau blanc, à la sortie d’un gros 4x4 blindé noir, aux côtés du président Nkurunziza tout sourire. A l’occasion, le tapis rouge a été déroulé. On le voit serrer la main de représentants du gouvernement. On a l’impression d’une visite presque de courtoisie, sauf qu’un élément n’échappe pas au journal New Vision : l’absence de représentants de l’opposition. « Les figures importantes de l’opposition ont rejeté le rôle de Museveni dans la médiation », peut-on lire.
Le quotidien ougandais fait écho aux mises en gardes de diplomates occidentaux, face aux rumeurs de groupes armés se préparant à la guerre. Les discussions officielles ont d’ailleurs aussi pour but de faire le point sur « la sécurité aux frontières afin d’éviter tout débordements mettant en péril la stabilité régionale », rappelle le quotidien burundais New vision.
Kagame en route pour un nouveau mandat présidentiel en 2017
Justement, puisqu’on parle des pays voisins, dans l’un des principaux, le Rwanda, le président Paul Kagame pourrait bien se représenter en 2017. Le parlement rwandais s’est prononcé ce mardi en faveur d’une révision constitutionnelle pour abandonner la limitation actuelle à deux mandats présidentiels. Le journal New Times a préféré donner la parole aux civils qui ont pu assister aux débats parlementaires. Les députés ont estimé hier que les quelques quatre millions de pétitions de la population étaient fondés pour enclencher une révision de la constitution. A en croire New Times, tous ceux qui ont assisté hier aux débats sont pour cette révision, et ne cachent pas leur satisfaction concernant le bilan du président Kagame.
Ce qui est certain, c’est que la méthode pour pouvoir se représenter ne semble pas vraiment la même qu’au Burundi. Là où le président Kagame cherche de toute évidence la légitimité populaire, le président Nkurunziza, s’est octroyé ce droit, sans consulter son peuple.