A la Une: six ans de prison pour Karim Wade

« Karim Wade écope de 6 ans fermes et 138 milliards de FCFA d’amende » pour enrichissement illicite : le verdict prononcé hier par la CREI, la Cour de répression de l’enrichissement illicite, s’étale en première page du Soleil à Dakar. Et pour le quotidien sénégalais, justice a été rendue : « voilà un verdict plein d’enseignements, à la lumière de la promesse que le président Macky Sall, alors candidat à la magistrature suprême, avait faite de lutter farouchement contre la prévarication des ressources publiques. C’est une exigence citoyenne que le chef de l’Etat a honoré, en laissant à la justice et aux juges, en leur âme et conscience, le soin de dire le droit, rien que le droit. »

Le Soleil tire trois enseignements de ce verdict :
1. « cette sentence constitue un sérieux avertissement pour tous ceux qui seraient tentés par l’usage abusif ou le détournement de deniers publics à des fins d’enrichissement personnel. »
2. « les juges sénégalais savent, en leur âme et conscience, prendre leurs responsabilités et les assumer. »
3. Le Soleil se félicite de la « maturité des Sénégalais et des Sénégalaises. A part quelques échauffourées vite circonscrites, la situation a été calme sur l’ensemble du pays. Le verdict a été prononcé sans que cela ne soit le point de départ d’émeutes comme certains l’avaient craint. »

Le Quotidien pour sa part, autre journal sénégalais, joue l’ironie avec ce titre : « la CREI élit Wade pour 6 ans »

Le Quotidien pour qui il faut « aller jusqu’au bout » dans la traque des biens supposés mal acquis : « Il ne faut pas se limiter à la condamnation de l’ancien ministre d’Etat Karim Wade, la traque doit être étendue à toutes les personnalités visées au départ par le Parquet spécial auprès de la CREI. Mais, chemin faisant, les tenants et dirigeants actuels du pouvoir doivent aussi passer au scanner de l’Ofnac et des organes de contrôle de l’Etat comme l’Ige et la Cour des comptes, avant la fin même du mandat du chef de l’Etat Macky Sall. »

Pour Enquête, autre quotidien sénégalais, c’est « la chute du candidat » Enquête qui pointe l’exemplarité de ce procès : « au fond, le “jeu” auquel nous assistons est une bonne et belle “jurisprudence” pour le Sénégal. L’effet atteint n’est peut-être pas le même que celui qui était visé, mais l’actuel pouvoir est en train de créer un précédent qui fera forcément tâche d’huile. […] Que l’épée de la Justice puisse tomber avec tout son tranchant sur une personnalité aussi importante de l’ancien régime, est sans doute la preuve que le chat noir de l’impunité est en train d’être tué. Et que demain, l’épée pourra tomber sur n’importe qui, quel que soit le niveau de responsabilité occupée. » Toutefois, tempère Enquête, « le côté gênant de la chose est le caractère sectaire de la traque. On a comme l’impression que certains ont déjà négocié leur impunité alors que rien ne garantit que les actuels tenants du régime vont tirer les bonnes leçons de la chute d’Icare. »

Présidentiable ?

Reste que Karim Wade est toujours « présidentiable », relève pour sa part Walfadjri… Il va très certainement se pourvoir en cassation auprès de la Cour suprême. Et si sa condamnation était confirmée, il pourrait malgré tout bénéficier d’une libération conditionnelle, d’une amnistie ou encore d’une grâce présidentielle… Mais d’ores et déjà, assure le journal, « Karim Wade conserve tous ses droits civiques. Son avenir politique n’est plus compromis. En écartant le délit de corruption pour lequel il a été relaxé, il échappe de facto à l’article 34 du Code pénal dont le procureur spécial avait voulu l’application. Ensuite, poursuit Walfadjri, dans son arrêt de condamnation rendu hier, le juge n’a pas fait état de cet article 34 durant les deux longues heures de la lecture de sa décision de condamnation et de relaxe partielle contre les prévenus. Par conséquent, Wade-fils pourra bel et bien se présenter aux prochaines élections en conservant l’ensemble de ses droits civiques. »

Alors, Wade fils candidat en 2017 ? Pas si évident… Le quotidien Aujourd’hui, au Burkina, explore les différentes hypothèses… « Si par extraordinaire, la Cour suprême accédait au recours de la défense de Karim, et l’élargissait, il en sortirait blindé politiquement et pourrait même, auréolé de cette escale-prison, prendre vraiment la tête du PDS, même s’il lui faut encore un peu de training. Si par calcul politique, Macky Sall le graciait pour espérer en récolter les retombées, ce serait peine perdue, car à coup sûr, Karim userait du devoir d’ingratitude, et le combattrait pour récupérer le fauteuil de son père, surtout qu’il est convaincu que tous ses malheurs viennent de Sall. Enfin, s’il purge toute sa peine, il lui reste 4 ans et selon que les Sénégalais choisissent de maintenir le mandat présidentiel à 5 ou 7 ans, Karim pourrait éventuellement réveiller ses ambitions… »

Mais tout cela fait beaucoup de “si”…

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