Ce chiffre de 7,3 % de croissance au troisième trimestre a semé l'effroi parce que c'est le plus bas étiage depuis 5 ans. À mettre en relation avec le 6,6 % de croissance du premier trimestre 2009, c'est-à-dire quand l'économie chinoise encaissait le contrecoup de la crise financière. Mais cette fois, ce n'est pas le monde extérieur qui ralentit la trajectoire de la deuxième économie de la planète, c'est son manque de ressort interne. Pendant les 3 décennies de l'hyper-croissance, de l'ordre de plus de 10 % annuel jusqu'en 2010, les usines et les logements ont poussé comme des champignons grâce à l'argent public, grâce à des prêts plus ou moins bien garantis.
Aujourd'hui les usines sont en très nettes surcapacités, et le marché immobilier regorge de biens qui ne trouvent plus preneur. Cette forêt d'immeubles vides est la plus grosse menace qui pèse sur l'économie chinoise. Les ventes de logement ont reculé de 10 % sur les 9 premiers mois de l'année, mais les investissements dans la pierre continuent à progresser. Une anomalie qui alourdit encore le déséquilibre du marché.
Pékin va-t-il à nouveau soutenir l'économie pour y remédier ?
C'est ce que réclament certains ministres, des gouverneurs locaux. Mais est-ce vraiment la solution ? Les minis plans de relance mis en place depuis deux ans ont eu des effets passagers, ils n'ont pas réussi à juguler définitivement le ralentissement. Et puis ouvrir les vannes du crédit bon marché, c'est une fuite en avant périlleuse, car l'argent facile aggrave les déséquilibres. Les autorités en sont bien conscientes. Elles ont promis de laisser faire le marché en début d'année. Plusieurs entreprises en faillite en ont fait les frais en 2014, elles n'ont pas été sauvées par l'État, contrairement à la coutume locale.
Mais jusqu'où les autorités chinoises sont-elles prêtes à aller ? Une plus grande ouverture de l'économie, c'est moins de contrôle pour elle, et bien sûr des risques de troubles sociaux susceptibles de remettre en cause leur légitimité. À défaut d'apporter une solution durable au ralentissement de l'économie, le gouvernement adapte son discours. Le premier ministre hier s'est dit à l'aise avec les chiffres qui reflète la nouvelle norme. Respecter ou non l'objectif des 7,5 % de croissance fixé pour 2014 n'a donc plus l'air d'être un mandat impératif à Pékin.
Le ralentissement est donc acté par les autorités, est-il supportable pour la population ?
Avec une croissance à 7 %, 10 millions d'emplois sont créés. Cela couvre largement la demande des 7 millions de diplômés qui arrivent sur le marché du travail, encore faut-il que les nouveaux postes correspondent à leurs qualifications. Mais dans les prochaines années, la croissance va s'étioler encore plus. Des analystes américains prévoient une moyenne de 3,9 % entre 2020 et 2025.
À ce rythme les nouveaux besoins de la classe moyenne chinoise en éducation, en santé, seront-ils satisfaits ? Quid des retraites qui se profilent avec le vieillissement de la population ? C'est maintenant que le gouvernement chinois doit relever ses défis. Avec une épée de Damoclès sur les finances chinoises. La dette qui s'envole. D'après la banque mondiale la dette publique ajoutée à celle du privé représente plus du double du produit intérieur brut du pays, une situation comparable à celle de l'Irlande avant 2008.