France-Allemagne, un couple à deux vitesses

Alors que le Premier ministre Manuel Valls est en visite en Allemagne, Angela Merkel a salué les efforts ambitieux de la France pour se réformer. Mais pas question de dépenser plus pour relancer la croissance selon la chancelière.

Les Français qui espéraient un geste sonnant et trébuchant de l'Allemagne en seront pour leur frais. Angela Merkel a juste concédé que la mise en oeuvre du pacte de stabilité européen contient un volet de flexibilité. En clair le nouveau dérapage budgétaire de la France ne donnera pas nécessairement lieu à des sanctions, c'est à la commission d'en décider. Mais sur la relance par l'investissement public, Berlin ne veut rien entendre. Le couple franco-allemand fait maintenant chambre à part. Chacun doit compter sur ses propres forces.

Cette fermeté sur l'orthodoxie budgétaire est souvent interprétée comme de la rigidité au sud de l'Europe. Mais elle correspond surtout à des impératifs complètement divergents entre Paris et Berlin. La France qui a une population toujours en hausse, garde au fond une perception optimiste de la gestion de la dette. Tandis que l'Allemagne qui vieillit s'inquiète du futur équilibre de son régime retraite, elle tient donc fermement les cordons de la bourse en prévision des dépenses croissantes à venir.

Les deux pays sont pourtant tous les deux affectés par la panne de la croissance

C'est vrai que l'Allemagne a fini par être contaminée par l'apathie. Au deuxième trimestre la croissance a trébuché, depuis, le moral des entrepreneurs flanche. Mais cette baisse de régime est à relativiser. Regardez les acquisitions monstres que réalisent en ce moment par les champions allemands. L'énergéticien Siemens, qui devait sauver le français Alstom des griffes de l'américain General Electric est en train d'agrandir son périmètre aux États-Unis en rachetant une société très active dans le gaz de schiste pour plus près de 6 milliards d'euros.

Merck, le champion allemand de la chimie lance aussi une OPA amicale de l'autre côté de l'Atlantique, montant 13 milliards d'euros. Enfin la semaine dernière, SAP le numéro un européen des logiciels a racheté l'américain Concur pour là aussi une poignée de milliards afin de renforcer sa présence dans le Cloud, le nuage où l'on stocke les données. Ce mécano industriel indique que l'Allemagne va chercher la croissance là où elle se trouve, avec des capitaux privés. Avec d'autant plus de facilités que les poches de ces entreprises exportatrices sont bien remplies.

L'Allemagne se désintéresse-t-elle du marché européen ?

Sur le plan commercial pas vraiment. L'Allemagne importe de plus en plus de produits en provenance de l'Union Européenne, et si ses exportations intra européenne ont décru en valeur depuis 2008, c'est surtout à cause de la crise qui a effacé une partie de la demande. L'offensive de ces entreprises aux États-Unis démontre surtout que l'Allemagne est à fond dans la course pour conserver chez elle des activités porteuses. Illustration dans le secteur du numérique où l'Allemagne, comme la France, s'est dotée d'un plan numérique. Mais avec une tout autre approche.

Tandis que Paris veut faire émerger des champions nationaux, Berlin cherche à innerver tout le tissu économique avec le numérique. Il y a 160 000 robots en service dans les usines allemandes, 34 000 en France. Pendant que les Français cherchent à améliorer leur compétitivité en abaissant les charges, les Allemands sont déjà dans le coup d'après. Ils cherchent maintenant à muscler leur compétitivité en injectant plus d'internet dans leurs procédées et dans les marchandises qu'ils fabriquent. Pour soutenir cet essor, défendre ses intérêts, l'Allemagne a maintenant un représentant à Bruxelles. Günter Ottinguer est le prochain commissaire à l'économie numérique, un poste idéal pour suivre de près l'évolution des Google et autres Microsoft sur le sol européen.
 


♦ En bref dans l'actualité économique :

Déjà 10 millions d'iPhone 6 vendus à travers le monde en seulement trois jours


C'est un nouveau record pour Apple. Les ventes de son nouveau téléphone intelligent dépassent largement celle de la version précédente. Il y a deux ans, l'iPhone 5 avait séduit 5 millions de clients pendant son lancement.

Partager :