Les producteurs de caoutchouc défient la loi martiale en Thaïlande. Ils sont prêts à bloquer les usines de transformation du latex dans le sud du pays et à « monter » sur Bangkok pour réclamer une aide du gouvernement. Le montant, 45 bahts (1,4 dollar), qu'ils reçoivent désormais pour un kilo de caoutchouc, quatre fois moins qu'en 2011, ne couvre même pas leur coût de production. La junte au pouvoir à Bangkok depuis trois mois est aussi impuissante que le régime précédent à endiguer le déclin des cours mondiaux. La Thaïlande est le premier exportateur mondial de caoutchouc naturel devant l'Indonésie. Or, il y a une surproduction mondiale pour la troisième année consécutive.
Les pays d'Asie et d'Afrique ont développé les plantations lorsque les cours étaient à la hausse. Aujourd'hui, les hévéas produisent à plein, mais le marché mondial, constitué pour un tiers par la Chine, ne peut plus absorber tout ce caoutchouc. Les stocks chinois sont pleins, Pékin est en outre visé par une enquête pour dumping par les Etats-Unis, ce qui risque de mettre à mal ses exportations de pneus, 30% à 40% de l'usage du caoutchouc naturel. L'Asie du Sud-Est n'a pas su organiser une véritable rétention de la production, le Vietnam n'en voulait pas : la Thaïlande s'est retrouvée seule à stocker du caoutchouc, que la junte doit aujourd'hui écouler massivement sur le marché mondial, pour des raisons budgétaires, ce qui accélère le déclin des prix. C'est l'arrachage des hévéas que les autorités de Bangkok subventionnent désormais.
Les cours du caoutchouc naturel au plus bas depuis cinq ans sont en revanche une aubaine pour une industrie pneumatique en difficulté, qui profite en même temps d'une chute des prix du pétrole, la matière première du caoutchouc synthétique. De même, les fabricants de gants en caoutchouc, aux deux tiers produits en Malaisie aujourd'hui, font des économies de matière. Et leurs commandes, en hausse tous les ans, pourraient s'envoler si l'épidémie d'Ebola sortait des frontières de l'Afrique.