Ce n'est pas la première fois qu'un cyber-pirate s'en prend à un média. En janvier 2012, le site de l'hebdomadaire L'Express avait ainsi été bloqué après que son directeur se fut vanté d'en avoir fermé l'accès aux Anonymous. Auparavant, c'était le site du tabloïd anglais, the Sun, qui avait fait l'objet d'une cyber attaque, après le scandale des écoutes opérées par un journal du même groupe, News of the World.
Avec Ulcan, on entre dans une étrange dimension. Ce hacker sioniste ne se contente pas de bloquer Rue 89 comme des sites qu'il juge pro-Hamas. Il a été jusqu'à usurper l'identité du directeur de ce site, Pierre Haski, pour susciter l'intervention des forces de l'ordre chez lui à 4h du matin. Il s'est aussi fait passer pour un policier annonçant la mort d'un journaliste de Rue 89 à ses parents. Ce mauvais canular a tourné au drame puisque le père de ce journaliste a fait un infarctus cinq jours plus tard et se trouve dans le coma.
Rue 89 a bien sûr porté plainte, mais cette affaire est emblématique des menaces que peut exercer sur la liberté de la presse un hacker opérant depuis un pays, Israël, où il n'y a pas d'accord d'extradition avec la France. Tout ce que peut glaner comme informations personnelles le pirate, avec une apparente facilité, sert à intimider le journaliste. En Ukraine comme en Russie, plusieurs centaines de cyber soldats, sans lien apparent ou avéré avec les gouvernements, s'emploient aussi à faire pression sur les médias en ligne soit en bombardant les forums de messages de soutien soit en bloquant temporairement les sites.
Ces cyber attaques dite « par déni de service », impliquent de synchroniser un grand nombre de requêtes sur le site pour le faire tomber. Ce qui suppose une action concertée, propre aux Anonymous, par exemple. Dans le cas de Grégory Chelli, alias Ulcan, ancien de la Ligue de défense juive (LDJ), on est frappé par la dimension narcissique de son cyber combat qui est tout sauf anonyme. Ce qui signifie que même s'il bénéficie d'appuis en ligne, il roule d'abord pour lui seul.
Cela ne le rend pas moins menaçant car il s'en prend à de simples journalistes ou à leurs proches. A tel point que Libération signe sous pseudonyme quand il lui consacre un article. Ulcan pourrait néanmoins trouver sur sa route des Anonymous comme ceux qui ont piraté récemment le site du Mossad ou qui respectent la liberté des journalistes. La mouvance est en effet multiple : on trouve des hackers au service de Bachar el-Assad mais aussi d'autres comme les Telecomix avec lesquels travaille Mediapart et qui n'ont de cesse de lutter contre la cyber oppression des États totalitaires.