RFI : La Confédération africaine de Football est-elle très inquiète de la situation de la propagation du virus Ebola ?
Hicham El Amrani : On suit avec beaucoup d’attention la situation en Afrique de l’Ouest, sachant qu’aujourd’hui, il y a eu près de 1 800 cas répertoriés et que nous avons dépassé les 1 000 décès. Donc oui, forcément, nous sommes préoccupés par la situation actuelle.
Etes-vous en rapport avec des organismes comme l’OMS, par exemple, ou avec les différents organismes des pays touchés ? Avez-vous mis en place une cellule de crise à la Confédération ?
Je ne peux pas appeler cela une cellule de crise. Nous ne sommes pas en contact direct avec les gouvernements, car cela revient aux fédérations d’avoir ce lien direct. Mais, bien évidemment, avant de prendre une décision pareil, nous avons eu l’avis de différents experts médicaux, dont les membres de la commission médicale de la CAF. Mais, surtout, un avis formel de la part de l’Organisation mondiale de la santé avec qui nous avons communiqué il y a quelques jours. Le docteur Sambo, qui est le directeur régional de l’organisation pour l’Afrique, nous a confirmé la position de l’OMS sur les différentes recommandations.
Dans ces recommandations, il a clairement été dit qu’il n’était pas nécessaire de mettre une restriction sur le voyage aérien de manière générale, y compris pour les zones infectées. Mais qu’il était peut-être dangereux – et donc nécessaire de reporter - un certain nombre de rencontres, par rapport au fait que ces matches de football représentent des rassemblements de masse. Par conséquent, le risque pourrait être important. Donc, selon ces recommandations et avec l’avis des experts médicaux de la CAF, nous avons décidé de cette position : de maintenir les différentes rencontres, à l’exception des trois pays concernés.
Beaucoup de clubs sont inquiets aujourd’hui. Les clubs d’Afrique du Nord qui ont, dans leurs effectifs, des joueurs d’Afrique subsaharienne, d’Afrique de l’Ouest notamment. Et puis, les clubs européens, qui n’ont pas vraiment envie, pour certains, que leurs joueurs rejoignent leurs sélections dans des pays à risque, par peur d’une possible infection. Avez-vous eu, à la Confédération africaine de football, des échos venant d’Europe ou d’ailleurs ? Ou des contacts avec des clubs et des joueurs qui seraient inquiets ?
Venant d’Europe, pas particulièrement. Mais nous sommes en contact constant avec les Fédérations membres de la CAF, notamment par rapport à l’organisation des différentes phases qualificatives - non seulement pour la prochaine Coupe d’Afrique des Nations au Maroc, mais également pour les compétitions à catégories d’âges. Le point extrêmement important, mis à part le fait d’avoir demandé à délocaliser les matches au niveau des trois pays, c’est de s’assurer que ces pays-là puissent être reçus par leurs homologues pour les différentes rencontres. Cela ne dépend pas seulement de l’avis de la fédération bien évidemment, mais du gouvernement et des autorités sanitaires du pays. C’est pour cela que la CAF a communiqué à ces membres pour leur demander de s’assurer que la bonne information est partagée entre eux et que les différents contrôles puissent être faits, autant au départ des équipes concernées qu’au niveau des points d’arrivée.
Concrètement, cela concerne le déplacement de la Sierra Léone en Côte d’Ivoire pour la première journée des éliminatoires début septembre ?
Par exemple oui, tout à fait.
La semaine dernière, le Togo avait pris les devants en demandant la délocalisation de son match éliminatoire prévu début septembre à Conakry. On sait où se déroulera ce Guinée – Togo ?
Aujourd’hui, non. C’est à la partie guinéenne de faire une proposition concrète à la CAF, après avoir discuté avec un certain nombre de membres. Bien évidemment, ils sont libres de voir dans quelles mesures ils peuvent jouer dans tel ou tel pays. Aujourd’hui, nous n’avons pas d’information confirmée quant au lieu de la rencontre Guinée – Togo.
On parlait des éliminatoires de la CAN 2015, mi-septembre se joueront également des matches de la CAN des moins de 17 ans. Et le hasard fait qu’il y a, au programme, un certain Guinée – Togo, prévu en Guinée. Donc, logiquement, ce match sera délocalisé ou les consignes de sécurité ne vont-elles que jusqu’à mi-septembre ? Il y aura une nouvelle évaluation de la situation. Donc, ces matches de CAN des moins de 17 ans sont-ils concernés ?
Ces matches sont concernés. Nous avons demandé à la Fédération guinéenne de football de délocaliser également ce match, non seulement celui concernant la CAN senior, mais également [celui concernant] la CAN U17. Donc, nous attendons également que la partie guinéenne nous confirme le lieu où se déroulerait cette rencontre. Et puis, la Confédération africaine réévaluera la situation dans un mois, en fonction de l’avancement des choses et en espérant que l’on pourra permettre à tous les pays d’organiser les différents matches. Si ce n’est pas le cas, à ce moment-là, on prendra la décision qui s’impose.
C’est la première fois que la CAF est confrontée à ce genre de situation, à un risque sanitaire qui menace les compétitions ?
Je ne peux pas vous dire à coup sûr, dans l’historique du football africain, que c’est la première fois. Mais dans ces récentes années, je pense que oui, par rapport à une épidémie de ce type et au mode de transmission. Il faut quand même la prendre très au sérieux et nous sommes conscients de préserver la santé des joueurs et des populations africaines de manière générale. Nous prenons donc toutes les précautions nécessaires pour éviter les problèmes majeurs.